L’exposition “Sculpting the Senses” au Musée des Arts décoratifs met à l’honneur Iris van Herpen

Peu importe les collections auxquelles elles appartiennent, ses pièces sont toutes plus incroyables les unes que les autres. Ici, pas de velours ni de brocart, mais plutôt des plastiques et polymères. Iris van Herpen donne à travers ses créations une forme à l’informe, puise dans la matière organique pour façonner ses pièces avec des matériaux surprenants. Son travail transforme les métaux en tissus, l’eau en tulle. La première salle nous montre des robes cristallines qui semblent figurer l’eau à l’état liquide et gazeux. Le corps, lui, est reconfiguré. La couturière propulse nos poumons et nos os hors de nous pour nous les faire porter, à l’image de cette remarquable robe squelette.

C’est également le monde marin qui l’inspire, les phénomènes cosmiques, les fractales mathématiques. Iris van Herpen est fascinée par l’invisible, l’infiniment petit et les origines du monde. Cette exposition éclaire tous ces centres d’intérêt divers. Le parcours est jalonné d’œuvres d’art contemporain qui entrent parfaitement en résonance avec la passion multidisciplinaire d’Iris van Herpen. Elles participent à créer un véritable dialogue conceptuel et enrichissent notre expérience multisensorielle de visiteur. On y trouve notamment des installations, vidéos, photographies et œuvres issues de l’histoire naturelle, ainsi que des pièces provenant des sciences naturelles comme des coraux ou des fossiles.

Avec l’exposition “Sculpting the Senses”, le Musée des Arts décoratifs nous permet aussi de pénétrer dans le laboratoire d’Iris van Herpen. Une salle munie de petits microscopes présente une série de croquis, et des bouts de matière ayant servi à l’élaboration de créations iconiques. C’est l’occasion de découvrir l’originalité de son travail technique. Du moulage en silicone à l’impression 3D en passant par le verre soufflé au plexiglas thermoformé, de la découpe laser au Suminagashi, aux dessins marbrés à l’encre, Iris van Herpen fait preuve d’une inventivité visionnaire. Ce sont des humains réinventés qui sont sous nos yeux, nous questionnant sur notre rapport aux artifices et au transhumanisme.

Poésie et rêves

L’exposition montre tour à tour les inspirations multiples de ses créations, en consacrant chaque salle à une thématique phare de son univers. Elles sont au nombre de 9. Mais ce n’est pas par l’observation froide que le parcours s’expérimente. Il s’agit plutôt d’une virée immersive. Chaque salle est dotée d’un éclairage spécifique et de bruitages expressifs qui s’accordent aux salles. On y déambule en ayant le sentiment d’être projeté dans un rêve tout droit sorti de peintures surréalistes. Au cours de cette promenade, les robes défilent, comme si elles étaient mues par une brise légère. Sont-elles animées par l’âme de la créatrice ou par un dispositif invisible niché hors de notre vue dans les ténèbres ?