Dans un monde saturé d’images nettes et instantanées, l’exposition Désordres propose un renversement salutaire. Réunissant cinq peintres venus de trois continents, elle transforme la peinture figurative en un espace d’ambiguïté, où le réel vacille et les repères se brouillent. Ici, la figure humaine, les objets ou les paysages ne sont jamais tout à fait ce qu’ils semblent être. Ils rassurent d’abord par leur familiarité, avant de déraper lentement vers l’étrangeté. Ce glissement n’est pas un accident, mais une stratégie.
Ces artistes utilisent la figuration comme un piège visuel, une entrée en matière qui déstabilise plus qu’elle n’éclaire. Une frontalité trop marquée, des proportions faussées, des scènes vides ou au contraire surchargées : partout, l’équilibre vacille. Le spectateur n’observe plus depuis l’extérieur, il est happé. L’univers devient alors théâtre : un espace où les apparences sont rejouées, amplifiées, parfois tournées en dérision. Les corps se donnent en spectacle, les chevaux s’emballent, les foules se confondent.

Harout, Etat n°6, huile sur toile 84,5 x 95 cm, 2015
L’image ne cherche pas la belle composition ni l’harmonie : elle travaille la faille.
Face à la tentation d’un monde lisible et contrôlé, ces artistes répondent par le doute, la dénonciation, l’excès ou l’absurde.