Trois jeunes artistes chinois se partagent les cimaises de la galerie New Image, du 21 novembre au 5 décembre, pour l’exposition La voix orientale, l’art de la jeunesse au sud-ouest de la Chine.
Sur ses peintures rattachées à la série L’amour du siècle prochain, Shuke Xu fait réapparaître sans cesse la figure du Bouddha. Le terme sanskrit bouddha, adjectif dérivé du verbe budhyate signifiant s’éveiller, désigne une personne réveillée du long sommeil de l’ignorance, une personne ayant atteint un état spirituel élevé, et ainsi acquis une grande connaissance des êtres et des choses. Sur ces tableaux, sa figure reste inintelligible. Ce qui semble être une vitre le voile, notre vision est floue. On peut dès lors facilement interpréter cette série comme une critique de l’artiste vis-à-vis de la censure en Chine, dans la presse, sur Internet, mais aussi dans le monde de l’art. A travers son œuvre, il représente l’hermétisme de l’information. Pourtant, le tracé laissé par un doigt, comme pour effacer la buée de la vitre, écrivant des mots comme « Hello » ou « Dream », est un message plein d’optimisme pour le siècle prochain, laissant entrevoir l’image nette du Bouddha.
A ces côtés, s’expose l’œuvre de Ming Yang. Quel secret renferme la Pierre ardente du lac Tai ? Ses minuscules divisions et embranchements, sa couleur rouge sang, suggèrent une membrane de tissus cellulaires, lui conférant son caractère organique : ces tableaux respirent la vie. Le caractère minéral de la pierre entre en tension avec notre ressenti. L’image du corail se déploie naturellement. Objet de mythes et de légendes, à cause de sa couleur rouge sang, et de sa réputation de pouvoirs magiques, les spécialistes ont longtemps débattu sur sa nature, minérale, végétale ou animale. On notera que cette espèce figure dans l’écosystème chinois. Dans sa technique, Ming Yang combine un savoir-faire autochtone – les traits de lignes de la lithographie chinoise traditionnelle – à des inspirations puisées dans la peinture occidentale, notamment ses textures et ses couleurs.
Ce trio est complété par l’artiste Xiatong Feng, qui travaille dans ses acryliques sur le pigment : son changement, sa solidification. La palette de couleur reste sobre, avec du noir, du blanc et du bleu, qui évoque à la fois un univers aquatique et aérien. Sur le fond statique, un camaïeu de bleu peint en glacis, vient s’ajouter comme un calque des ombres noires, légères et flottantes qui semblent projetées, presque accidentelles. Mobiles, elles coulent comme l’eau d’une cascade chimérique. À travers son travail, Xiatong Feng souhaite conjuguer l’art ancien et l’art contemporain chinois.
Ces trois voix n’en forme plus qu’une, célébrant l’éveil d’une jeunesse chinoise, prête à renouer le lien entre ses racines ancestrales et la modernité.
Texte : Alix Meynadier
Visuel : Ming Yang, Une pierre ardente du lac Tai, 3, 100 x 100 cm, 2017 ©Galerie New Image