Laure Albin-Guillot : le panache de la photographie française 

Laure Albin-Guillot : le panache de la photographie française 

Qui de nos jours peut se vanter de reconnaître la personne cachée derrière le nom de Laure Albin-Guillot ? Cette femme ne vous est pas familière ? C’est parce qu’elle a été jetée dans l‘oubli général peu après la fin de la Seconde Guerre Mondiale, laissant son souvenir s’envoler lentement mais sûrement, jusqu’à ce que le Musée du Jeu de Paume lui dédie une exposition monographique en 2013. Depuis, les manifestations ne se bousculent pas, et il faudra attendre octobre 2022 pour voir de nouveau l’art de Laure Albin-Guillot célébré dans une galerie, et pas n’importe quelle galerie puisqu’il s’agit de l’agence de photographies Roger-Viollet, l’heureux possesseur de 52 000 négatifs originaux, de 20 000 épreuves d’époque, de correspondance et de documents autographes de la photographe. 

/// Lolita Fragneau

Laure Meifredy naît en 1879 dans la capitale parisienne et se marie avec un scientifique, un certain monsieur Albin Guillot. Son attrait pour la photographie se développe grâce à la passion de son mari, qui aimait collectionner des préparations microscopiques : elle débute ainsi ses premières microphotographies sur autochromes dans la fin des années 1920 dont le travail est fondé sur la découpe de végétaux et de minéraux. Puis, son mari devenant trop malade pour travailler, elle assure la sécurité financière de son foyer en travaillant dans le domaine de la mode, et collabore avec des magazines célèbres qui, petit à petit, cultivent sa renommée en tant que photographe mondaine. A la mort de son mari, elle est une femme indépendante et installe son atelier boulevard Beauséjour, dans le XVIe arrondissement de Paris. Le beau monde s’y croise pour se faire photographier, allant de personnalités importantes (Jean Cocteau, Colette) aux anonymes de la bourgeoisie parisienne.

Jean Cocteau (1889-1963), écrivain français, en 1939. © Laure Albin Guillot / Roger-Viollet

En tant que pionnière en photographie, elle s’est également démarquée dans ses études du nu, aussi bien féminin que masculin, une originalité qui n’aura de cesse d’étonner ses contemporains. Ses études sont soigneusement recadrées au crayon à papier directement sur tirage de lecture avant d’en tirer une épreuve définitive. S’imposant dans le milieu très peu engageant pour les femmes, presque réservé pour les hommes, Laure Albin-Guillot est la première conservatrice de la Cinémathèque nationale au palais de Chaillot. Se plaçant sur tous les fronts, elle publie en 1933 Photographie publicitaire, ouvrage définissant le rôle de la photographie dans la publicité moderne. Elle travailla activement jusqu’à ses soixante-douze ans, et continua d’exercer sa passion, la photographie, jusqu’à la fin de sa vie.

Microphotographie avec procédé autochrome. Photographie de Laure Albin Guillot (1879-1962).

Cette femme à la volonté de fer n’aura eu de cesse de se démarquer dans des domaines très différents – du nu à la photographie publicitaire en passant par la nature morte, la mode et le portrait. Elle a su magnifiquement sublimer les visages de ses modèles, capter l’originalité de leur personnalité pour la transfigurer sur la photographie. La galerie Roger-Viollet illustre brillamment la diversité de son art dans une scénographie qui met exergue le foisonnement de ses photographies.

Homme masqué. Modèle Albin-Guillot. France, 1920-1950. © Laure Albin Guillot / Roger-Viollet
 

Galerie Roger-Viollet