Le « surréalisme révolutionnaire » d’André Masson à la Galerie Jean-François Cazeau

Le « surréalisme révolutionnaire » d’André Masson à la Galerie Jean-François Cazeau

La Galerie Jean-François Cazeau marque une étape du parcours « Paris surréaliste » avec cette rétrospective consacrée à André Masson, figure majeure du mouvement.

 

 

/// Emma Boutier

 

 

Jean-François Cazeau expose un André Masson kaléidoscopique, relevant le défi de reconstituer un panorama de l’histoire de l’art du XXe siècle à travers un seul artiste. Membre fondateur du Surréalisme, André Masson ne connaît pas d’étiquette. Dynamique, compulsive et puissante, sa pratique de l’art déborde des courants artistiques, en croisant Cubisme et Fauvisme, pour s’épanouir dans l’abstraction lyrique parisienne et l’expressionnisme abstrait new-yorkais. La circulation des innovations de Masson est à l’image de sa vision du monde : un flux perpétuel.

Retour sur l’exposition à travers une sélection d’oeuvres. 

 

 

André Masson, Poursuite, 1933. Courtesy Galerie Jean-François Cazeau

 

 

Une philosophie bacchanale

Poursuite condense les réflexions formelles et philosophiques de Masson. La nervosité des traits et l’agressivité des couleurs reflètent l’intérêt du peintre pour les pulsions primaires de l’inconscient. L’humain et l’animal s’entrechoquent, se confondent presque, dans cette toile angoissée qui semble figurer une orgie délirante. En tant que fervent lecteur de Nietzsche, il identifie son mal-être, causé par son expérience de la Première Guerre mondiale, à une pulsion dionysiaque associant violence et érotisme.

Non loin de ce tableau est exposée Dans la forêt (1943), une sculpture de Masson qui éclaire son idée de la pulsion. Deux créatures s’étreignent jusqu’à former une masse hybride, à peine identifiable. On reconnaît cependant le Minotaure dans le visage à gueule ouverte, créature duale fruit du courroux divin et du désir humain. Une personnification idéale de la pulsion dionysiaque, qui dévoile le sous-texte mythologique de la vision du monde de Masson. Le traitement sensuel, sensible par la présence des traces de doigts dans l’argile, préfigure un art de l’instinct qui accorde plus d’importance à la matière.

 

Une soumission volontaire aux forces de la nature

Si le thème de la forêt évoque inévitablement le Romantisme, l’art de Masson est très loin des velléités conquérantes de Friedrich : dans Sentier Sous Bois (1923), la promesse d’un voyage infini cède la place à une nature dominante. Le cadrage serré et l’entremêlement des branches qui poussent en dehors des limites de la toile figurent une nature incontrôlable, étouffante, en croissance permanente.

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André Masson, Le Balisier, 1941. Courtesy Galerie Jean-François Cazeau

 

 

Un voyage fécond

L’exposition trace l’itinéraire d’un artiste et de ses innovations. Fuyant l’Occupation, Masson met le cap sur les États-Unis. D’une escale de trois semaines en Martinique, naquit un ensemble d’oeuvres que l’on peut regrouper dans une « période martiniquaise » de sa carrière.

L’insularité et l’exotisme permettent à l’artiste d’accoucher picturalement de sa fascination pour le mystère des forces telluriques. Cela donne lieu à des œuvres telles que Le Balisier, qui représente une métamorphose de la femme en végétal, dans une union métaphysique. Cette encre semble mettre au jour les affinités de Masson avec le courant du Primitivisme, qu’il manipule très singulièrement, avec un accent plus psychologique.

 

André Masson, L’énigme, ca. 1942. Courtesy Galerie Jean-François Cazeau.

 

Cette échappée finit par l’emmener au Connecticut, où il reprend les tableaux de sable amorcés à l’automne 1926. Ces expérimentations font de lui le pionnier d’une pratique artistique plus empirique et moins intellectuelle, qui laisse place à une forme d’expression hasardeuse.

Initiateur de l’automatisme, il s’intéresse d’abord au tracé libre de la colle qui retient les grains de sable. Sa pratique ne tardera pas à attiser la curiosité d’un Pollock ou d’un De Kooning, qui développeront la peinture gestuelle (action painting) à sa suite.

 

Jusqu’au 21 décembre 2024, découvrez les multiples facettes d’un artiste incontournable.

 

 

Pour compléter votre lecture : « Une célébration du centenaire du Surréalisme au Centre Pompidou » ; « Exposition Claude Cahun / Marcel Moore » 

 

Galerie Jean-François Cazeau

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