Les portraits iconophages de Jérôme Zonder

Les portraits iconophages de Jérôme Zonder

La Galerie Nathalie Obadia présente les œuvres de Jérôme Zonder dans une exposition personnelle intitulée « Ras Bord ». C’est l’occasion de faire la connaissance de Pierre-François, personnage fictif du film de Marcel Carné Les Enfants du Paradis, dont l’artiste se saisit de façon tout à fait singulière.

 

 

/// Emma Boutier

 

 

Les portraits de Jérôme Zonder sont les réceptacles d’une imagerie sans frontière ni époque. L’utilisation systématique du noir et blanc lui permet de créer un temps abstrait dans lequel coexistent plusieurs temporalités, incarnées dans chacune des images qui composent son personnage.

 

 

Jérôme Zonder, Étude pour un portrait de Pierre-François #98, 2024. © Jérôme Zonder / Adagp, Paris, 2024. Courtesy de l’artiste et de la Galerie Nathalie Obadia

 

 

Le panorama d’une culture visuelle intemporelle

À la manière d’Aby Warburg et son Atlas Mnémosyne, Zonder établit une continuité, dans l’espace pictural, entre des images issues de contextes éloignés. Il se rend au-delà du champ artistique pour y glaner des images de la culture populaire, qui deviennent la matière de ses œuvres d’art, fragilisant la frontière entre ces deux pôles de la représentation.

En faisant référence au collage, Zonder s’inscrit implicitement dans la continuité des artistes du groupe Dada. Pionniers de cette technique, les Dadaïstes revendiquaient déjà le décloisonnement de l’art institutionnel.

 

Jérôme Zonder, Étude pour un portrait de Pierre-François #101, 2024. © Jérôme Zonder / Adagp, Paris, 2024. Courtesy de l’artiste et de la Galerie Nathalie Obadia

 

Artifice et naturalisme

Mais le collage de Zonder est feint : chaque « image » est dessinée au graphite et au fusain. Cette ambivalence entre illusionnisme et picturalité caractérise les œuvres exposées.

Dans ce portrait en plan serré, le traitement hyperréaliste du sujet est inséparable d’une affirmation de la matière picturale. L’artiste crée l’illusion en même temps qu’il l’annule, les traces du fusain trahissant l’artifice. Le grain de peau est rendu avec une telle acuité que l’effet de réel est rompu, s’effaçant devant une mise en évidence de la technique. Le portrait révèle sa qualité d’image.

Jérôme Zonder, Étude pour un portrait de Pierre-François #103, 2024. © Jérôme Zonder / Adagp, Paris, 2024. Courtesy de l’artiste et de la Galerie Nathalie Obadia.

 

 

Zonder crée un univers où le réalisme ne se mesure plus par sa conformité au réel. Son personnage est représenté comme un être de chair, organique, sans pouvoir être rattaché à notre réalité : c’est là, sans doute, le propre du personnage de fiction.

Cette ambivalence est totalement en accord avec les réflexions de l’artiste sur les catégorisations dans la culture visuelle. Le spectateur hésite : est-il face à un dessin, un portrait photographique, une étude scientifique ? C’est tout à la fois : les œuvres de Zonder transcendent les classifications.

 

 

Tout un spectre de motifs donne vie aux personnages de Jérôme Zonder : des planches de bandes dessinées, ses traces de doigts, des séquences de films, des évènements historiques. L’artiste nous invite ainsi à prendre conscience que l’environnement visuel façonne nos identités, et, par conséquent, nos créations, dans un cycle perpétuel. 

 

 

 

Galerie Nathalie Obadia

icon-car.pngFullscreen-Logo
Galerie Nathalie Obadia

chargement de la carte - veuillez patienter...

Galerie Nathalie Obadia 48.858900, 2.351400