L’exposition la plus étincelante de Paris  

L’exposition la plus étincelante de Paris  

A l’occasion des soixante ans de la première collection d’Yves Saint Laurent sous son propre nom, le musée Yves Saint Laurent organise une exposition anniversaire nommée GOLD, Les ors d’Yves Saint Laurent du 14 octobre 2022 au 14 mai 2023. Elle retrace ainsi les multiples touches d’or qui ont traversé les différentes collections du couturier au cours de sa carrière, convoquant tour à tour l’exaltation du pouvoir des femmes, les années Palace et l’esprit de fête délirant caractéristique de cette époque.

/// Lolita Fragneau

Le parcours, à la fois chronologique et thématique, commence avec son fameux caban de lainage bleu emprunté au vestiaire marin et paré de boutons dorés dont le relief évoque le cordage d’un bateau, datant du défilé haute couture printemps – été 1962. Depuis ses débuts, Yves Saint Laurent accorde une grande importance à la dorure qui illumine somptueusement les ensembles qui paraîtraient austères ou apporte de l’extravagance à des modèles, transformant ainsi les boutons en véritables bijoux que l’on retrouve au fil ses collections. Puisque selon ses propres mots, « La gloire ne se conçoit que dorée » (Yves Saint Laurent, Le Figaro, 11 juillet 1991), le créateur habille les femmes de robes entièrement brodées de sequins étincelants, que ce soit pour les robes de jour ou de nuit, lors la collection haute couture automne – hiver 1966.

Ensemble de boutons dorés, Studio d’Yves Saint Laurent © Musée Yves Saint Laurent Paris © Matthieu Lavanchy

L’or, après tout, n’est-ce pas symbole de lumière, équivoque de l’astre le plus rayonnant de notre galaxie, et par extension, de joie et de puissance céleste ? Ne convient-il pas par-là de manière unanime à sublimer les courbes féminines, mais aussi à rendre les modèles plus assurées, plus audacieuses et plus fières ? Combiné au noir, le précieux métal entérine une alliance majestueuse qui rend à la femme moderne le pouvoir tant recherché. C’est donc vers une exaltation du corps mais aussi une popularisation que tendait aussi énergiquement le célèbre créateur de mode, en rendant l’or plus accessible et plus commun, plus seulement réservé à une élite sociétale ou aux divinités.

En montant les étages, l’ambiance se veut plus festive, car c’est dans ce genre de cérémonies très « tape-à-l’œil » que la haute couture y dévoile toute sa splendeur. Là où toutes les célébrités et les vedettes se rejoignent, il faut marquer, étonner, subjuguer, et quoi de mieux pour cela que les dorures signées Yves Saint Laurent ? Les nombreuses photographies retracent l’atmosphère incandescente de ces années, mêlant tenues extravagantes et styles sophistiqués.

© Maurice Bensimon

La dernière partie met en avant le fidèle compagnon de la garde-robe, celui qui parvient à donner son éclat au vêtement sans effort : le bijou. Yves Saint Laurent en parle ainsi aux journalistes de Elle : « Les bijoux : pas de pierreries, pas de couleurs, pas de clinquant. Juste de l’or, ou plutôt du doré, car je n’aime les bijoux que faux. » (1968). Si le couturier ne les dessine pas forcément, c’est parce qu’il laisse libre cours à l’imagination de sa complice Loulou de La Falaise. Cette dernière travaille à ses côtés jusqu’à la fermeture de la maison de couture en 2002. « Les accessoires, c’est l’autre façon de s’ha­biller Saint Laurent », énonce-t-elle. Sa fille, Anna Klossowski, réalise elle-même cette installation au sein du musée, illustrant tout l’imagination et la fantaisie de Loulou de La Falaise et du couturier. Elle les place sur un fond évoquant des trames de tissus dorés et colorés, rappelant ainsi que le bijou n’existe que sur le vêtement pour ce maître de la mode.

L’exposition s’achève sur le paroxysme de la brillance, mais probablement aussi de ses collections : la robe-bijou, issue de la collection haute couture automne-hiver 1966 et photographiée par David Bailey pour le Vogue Paris en décembre de la même année. Tout en paillettes et pierreries, elle rend hommage à la célèbre figure flamboyante de Cléopâtre, dernière reine d’Égypte. Ici, nul besoin d’accessoire, puisque le vêtement n’exige que lui-même pour briller de mille feux et ensoleiller le spectateur qui y pose le regard. De quoi redonner un peu de chaleur dans cette capitale plongée dans l’hiver.

Robe de soir long, Collection haute couture automne-hiver 1966 © Yves Saint Laurent © Nicolas Mathéus

Musée Yves Saint Laurent Paris