Margiela, les années Hermès

Margiela, les années Hermès

Le Musée des Arts Décoratifs présente du 22 mars au 2 septembre 2018 l’exposition Margiela, les années Hermès, qui retrace l’histoire de cette collaboration.

Deux grands noms, deux grandes marques, deux univers, pionniers de la mode d’une époque. Nous sommes en 1997, d’un côté le classicisme de la maison Hermès, le luxe à la française empreint de tradition, est devenu un symbole, de l’autre, Martin Margiela, jeune créateur prodige et novateur bouleverse les codes. Mais lorsque les deux mondes, qui semblent contradictoires, se rencontrent pour une collaboration entre 1997 et 2003, c’est l’effervescence. Un équilibre fructueux se fait alors entre le créateur et la marque que l’exposition propose de retracer par les pièces marquantes imprégnées de l’esprit de cette période, présentant notamment les créations réalisées pour sa propre marque, la Maison Martin Margiela.

Martin Margiela, personnage si emblématique et si mystérieux à fois. Aux antipodes de la starification, le créateur ne donne pas d’interviews, ne se montre pas, comme pour revendiquer le travail d’équipe qu’est une marque de vêtements. L’artisanat est placé au premier plan de la communication, et les matériaux utilisés insistent sur le travail manuel qu’est la création.

Une modernité se dégage des vêtements présents devant nos yeux. Loin des exubérances, ces collections sont pensées avec grâce et élégance, et laisse présager un nouveau but pour la mode. C’est une ode à la femme indépendante, qui ose porter des vêtements masculins. Dans la lignée de Jean-Paul Gauthier, avec qui Martin Margiela a travaillé avant sa collaboration avec Hermès, les vêtements emblématiques de la masculinité sont réappropriés et détournés. Le costume noir est réutilisé, la chemise blanche devient un bustier élégant, où les manches, nouées dans le dos, marque la taille du mannequin. Un mannequin qui est d’ailleurs choisi avec audace. Dans un monde où la jeunesse est placée sur un piédestal, où le casting est identique et cherche la juvénilité éternelle, Martin Margiela ose choisir des femmes, d’un âge allant de 25 et 65 ans, naturellement élégantes, caractérisées par une personnalité forte, marquée, autonome. 

Des révolutions qui se retrouvent jusqu’aux matériaux utilisés. Martin Margiela use de récupération, il joue avec les textures et des vêtements déjà crées, qu’il trouve dans des friperies. Les objets quotidiens retrouvent une place dans le monde stricte qu’était la mode : une couette de lit blanche et duvetée devient un manteau tendance que l’on retrouve dans les magasines, des gants en cuir usées et ternis par le temps sont assemblés pour se transformer en un haut qui laisse découvrir les courbes du dos.

Des looks oversizes, des vêtements construits et assemblés, des tissus réutilisés, monochromes, dans un espace divisé entre le blanc Margiela et l’orange symbolique d’Hermès, les créations se font écho. Le dialogue silencieux entre les vêtements nous laisse entrer dans le monde de Martin Margiela, révolutionnaire à tous les niveaux.

Texte : Angèle Imbert

Crédit Visuel : Affiche de l’exposition Margiela, les années Hermès, 2018