« Panoramas », une présentation de Marseille en 200 oeuvres 

« Panoramas », une présentation de Marseille en 200 oeuvres 

Au Centre de la Vieille Charité, les collections des musées de Marseille sont rassemblées dans une exposition kaléidoscopique, à l’image de la cité phocéenne. La diversité est le mot d’ordre de cet accrochage qui tisse des liens entre les régions et les âges, les ethnies et les genres, les médiums artistiques. Marseille tire parti de son statut de carrefour des civilisations, en restituant plusieurs siècles d’échanges.

 

/// Emma Boutier

 

 

Une histoire de l’art marseillaise

L’histoire de Marseille est reconstituée au travers de ses mythes, de la culture provençale, des inspirations qu’elle a suscité et de celles dont elle s’est enrichie. L’exposition est introduite par le mythe fondateur de la ville : l’union symbolique de la Gaule et de la Grèce, actée par celle, littérale, de la princesse Gyptis et du navigateur Protis. Marseille naît ainsi sous le sceau du multiculturalisme.

L’appartenance de la ville à la géographie des avant-gardes est rappelée. Si les peintres du début du XXe siècle ont majoritairement élu domicile dans la capitale, il en est certains pour qui les paysages marseillais ont servi de catalyseur à l’élaboration d’un nouveau style de peinture. Les vues de l’Estaque par Signac, Derain et Cézanne en sont la preuve.

 

Paul Signac, L’entrée du port de Marseille, 1911. © Musées de Marseille / photo Jean Bernard

L’exposition nous amène aussi dans les quartiers éclipsés de la scène artistique, tel que Saint-Jean du Désert, où s’étaient installés les premiers faïenciers de Marseille. Dès le XVIIe siècle, les ateliers produisent des céramiques qui témoignent de la longue route de la porcelaine chinoise « bleu et blanc ». Cette technique, au rayonnement sans frontière, est arrivée jusqu’à Marseille par l’intermédiaire des artisans de Delft (Pays-Bas). Les quelques productions de la fabrique de Joseph Clérissy sont symptomatiques de l’influence sino-néerlandaise dans l’artisanat marseillais des années 1600. Si les ateliers de faïences marseillais ont disparu au cours du XVIIIe siècle, ce « collier de cuisine » réalisé par Gésine Hackenber révèle la permanence de leur héritage dans l’artisanat contemporain.

Gésine Hackenberg, Small delft Blue Kitchen Necklace © Musées de Marseille / photo R. Chipault & B. Soligny

 

Les récits de la grande histoire de l’art

En confrontant des regards éloignés, chronologiquement et géographiquement, l’exposition propose une relecture de l’histoire de l’art à l’aune des particularismes, en réaction à l’universalisme impérieux ayant dominé la discipline pendant des siècles.

Dans une section consacrée aux influences « extra-occidentales » dans l’avant-garde européenne, l’on retrouve un face-à-face entre Picasso, qui était attendu, et Wifredo Lam, qui l’était moins. Artiste cubain proche du mouvement de la Négritude, il s’empare de symboles caribéens et africains pour enrichir un style moderniste occidental. Ses oeuvres répondent à un langage hybride tout à fait singulier.

Le rapprochement entre Lam et Picasso souligne l’importance du regard de l’artiste. Il s’agit d’une composante majeure de l’oeuvre, invisible à qui ne dispose pas du recul nécessaire, mais essentielle à son analyse. Deux peintures nourries par des influences similaires peuvent avoir des résonances contradictoires, selon le prisme qui préside à leur création.

 

 

Wifredo Lam, Le Bruit, 1943. © ADAGP © Centre Pompidou, MNAM-CCI/Georges Meguerditchian/Dist. GrandPalaisRmn

 

Si les regards ont une ethnie, ils ont aussi un genre. Le thème du corps est exploré à travers l’évolution de ses représentations au fil des siècles. Dans un tableau d’Henri Pinta, la nudité de la jeune femme consolée par Sainte Marthe était perçue par le spectateur contemporain comme une manière de signifier sa vulnérabilité, par contraste avec la robustesse de sa protectrice.

Plus d’un siècle plus tard, on ne peut que soupçonner une forme de gratuité dans ce nu, magnifié et offert au regard du spectateur masculin. Cette femme anonyme, de dos et le visage caché, est la cible d’un voyeurisme indéniable de la part du peintre, faisant de ce tableau une illustration idéale du male gaze (1).

 

Henri Ludovic Marius Pinta, Sainte Marthe, 1887 ©Ville de Marseille, Musée des Beaux- Arts/David Giancatarina

En regard de ces oeuvres, des artistes contemporains questionnent les injonctions et stéréotypes alimentant l’image du corps parfait, héritage de plusieurs siècles de représentations idéalisées. Les photographies de Mimmo Jodice dénoncent la persistance insidieuse de l’idéal du héros grec, qui continue de dicter les critères du corps masculin, critères célébrés par Pierre Amédée Marcel Beronneau à travers la figure d’Oprhée. 

 

Pierre Amédée Marcel Beronneau, Oprhée jouant de la cithare. © Musées de Marseille
 
 

 

Centre de la Vieille Charité

  • Adresse : 2 rue de la Charité
  • Code postal : 13002
  • Ville : Marseille
  • Pays : France
  • Tel : 04 91 14 58 80
  • Site Internet : www.mairie-marseille.fr
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Centre de la Vieille Charité

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