Jusqu’au 23 décembre, Sergey Kononov expose son solo show à la Galerie Lazarew. L’artiste d’origine ukrainienne dévoile une série de portraits inspirés par ses amis, constituant ainsi une cartographie de son entourage proche. À travers ses toiles, il capture avec finesse une jeunesse en quête de réponses, explorant un éventail d’émotions contrastées.
/// Nora Djabbari
Le travail de Sergey Kononov montre des portraits captivants dont les yeux nous happent et nous aguichent. Les personnages de l’artiste, pris au vif, ont la particularité d’intriguer par leurs couleurs, mais aussi leur expressivité. Ils dégagent une énergie sombre, presque vampirique. L’exposition entraîne le visiteur à plonger tour à tour dans des yeux d’un bleu glacial, dans l’exploration de chaires pulpeuses, dans l’intimité d’une chambre ou dans des fonds sombres qui évoquent le néant. L’artiste peint des épidermes nacrés qui sont si vivants qu’on croirait pouvoir déceler des veines transportant le sang. Ici, les corps nus à demi-nus reposent sur les toiles, chargées d’un silence pesant, presque sacré, provoquant en nous une profonde absorption contemplative.
Si le réalisme des figures s’inspire de l’intérêt de l’artiste pour les maîtres italiens, c’est bien la représentation de l’émotion qui prime, l’artiste cherchant à représenter un état plutôt qu’une réalité formelle. C’est ainsi qu’il évoque son attrait pour la force évocatrice du portrait : “Ce n’est pas forcément la ressemblance que je cherche, mais l’expression, l’ambiguïté, les questions qu’on devine dans leurs regards et dont je me sens proche”. L’artiste peint ses amis qu’il se plaît de plus en plus à mettre en scène. Dans cette nouvelle exposition, Sergey Kononov n’a pas oublié ses premiers amours expressionnistes et continue d’explorer la peinture en y ajoutant plus de réalisme. Une évolution artistique qui fut provoquée par son arrivée en France en 2015, par son passage aux Beaux Arts de Paris, puis lors d’un de ses voyages en Italie, marqué la redécouverte de Botticelli.
L’esthétique de ses toiles est parfois trash, au service d’une représentation désenchantée. Sergey Kononov peint des scènes de la vie quotidienne et inscrit ses représentations dans une époque ambiguë. Les tonalités mordorées instaurent une aura surannée, évoquent des cartes postales ou des publicités vintage tandis que l’harmonie doucereuse des tons nous rappelle la matité du tempera antique. Mais ce qui nous frappe, c’est incontestablement l’énergie saisissante de la jeunesse qu’il capte avec brio, une énergie dont émane sans aucun doute la modernité, le renouveau.
Doit-on voir une allusion à cette génération ukrainienne pleine d’espoirs et de doutes dont il fait partie ? Sans doute. Sergey Kononov a passé l’année 2022 dans son pays en pleine guerre. Durant cette année passée à Odessa à peindre, il s’inspirera de la violence pour produire de l’art, il étouffera sur papier le vacarme des cris et des bombes, pour nous offrir finalement ces silhouettes si touchantes et mélancoliques. De la douceur d’une jeune fille tenant tendrement son chat entre ses genoux à l’étreinte passionnée d’un couple, du chien pensif au jeune homme au syndrome de Peter Pan, chaque tableau de Sergey Kononov constitue des scènes qui restent gravées dans la mémoire, comme des mélodies obsédantes.
Galerie Lazarew
- Adresse : 14 rue du Perche
- Code postal : 75003
- Ville : Paris
- Pays : France
- Tel : 01 44 61 28 73
- Site Internet : https://galerie-lazarew.com/