Stéphanie Solinas, Haunted, Lost and Wanted

Stéphanie Solinas, Haunted, Lost and Wanted

Dans le cadre de Photo Saint Germain 2018, la galerie Gradiva consacre une exposition à Stéphanie Solinas. Haunted, Lost and Wanted est à découvrir jusqu’au 4 janvier 2019.  

Un serpent peint par Caravage, un torse du Christ par Lorenzo Costa, Stéphanie Solinas semble nous partager des photographies de voyage, des bribes de l’univers romain qu’elle côtoie à l’occasion de sa résidence à la Villa Médicis, où elle est pensionnaire cette année. Pourtant, le titre de la série L’Inexpliqué – Revenants laisse sous-entendre que ces images ne sont pas le fruit d’un simple reportage photographique ; elles dégagent une atmosphère mystérieuse, paraissent renfermer un secret.

De La Madone des Palefreniers, peint par Caravage entre 1605 et 1606, Stéphanie Solinas ne capture qu’un détail : le corps entortillé du serpent dont la tête est écrasée par le pied de Jésus enfant, symbole de la lutte contre le Mal. La polychromie de l’huile sur toile est supprimée au profit du noir et blanc de la photographie qui vient accentuer le clair-obscur, renforcer les contrastes entre la peau claire du jeune enfant vu de moitié et la noirceur de celle du reptile, tout en offrant une nouvelle interprétation de l’œuvre. Libre à nous de déchiffrer autrement cette allégorie chrétienne, ou d’imaginer le reste de la composition.

Stéphanie Solinas ne s’approprie pas seulement les toiles de maîtres, mais aussi des objets qui appartiennent à l’univers muséal. Le médium photographique lui permet de se focaliser sur un détail, de jouer sur les cadrages et la lumière afin de nous plonger dans son univers énigmatique. En détournant les objets de leur fonction première, elle brouille nos repères, remet en cause notre regard, nous interroge sur notre manière de voir : Volume noir, un simple socle vide, nous suggère une présence surnaturelle, paranormale.  De la même manière, le tissu rouge qui recouvre une œuvre en volume prend l’aspect d’un fantôme.

Texte : Anne Cuzon

Crédit visuel : Stéphanie Solinas, L’Inexpliqué – Revenants, Volume noir, Villa Médicis, Rome, 2018, 30 x 40 cm