Plonger dans l’œuvre de T’ang Haywen, c’est avant tout découvrir l’intensité poétique d’un artiste éperdument libre. On retient de ses toiles leur caractère méditatif, leurs mouvements qui révèlent des paysages abstraits ou plutôt “non figuratifs”, selon ses mots. On le compare souvent à Zao Wou Ki. Il mérite pourtant plus que quiconque la reconnaissance de sa singularité. Figure discrète mais importante de ces dernières décennies, T’ang Haywen peut à bon droit être considéré comme l’un des plus grands peintres à l’encre de sa génération. Le Musée Guimet possède aujourd’hui une large sélection grace à une donation de 202 œuvres et environ 400 pièces d’archives personnelles effectuée par la Direction nationale d’interventions domaniales en 2022. Cette rétrospective du Musée Guimet favorisera sans doute la reconnaissance de son héritage artistique. Car que dire de la postérité de T’ang Haywen ? Concentré sur son art et la perfection de son langage plutôt que la célébrité, il s’est bien plus imposé face à ses contemporains par l’originalité de son œuvre que par les honneurs posthumes et financiers. Cela faisait longtemps qu’un corpus aussi conséquent de ses travaux n’avait pas été exposé. Le public peut notamment voir pour la première fois ses créations sur carton.
Homme à l’esprit voyageur, T’ang Haywen grandit couronné de fleurs dans les hautes montagnes de Chine. Là, sous l’égide de son grand-père, peintre et calligraphe, il s’imprègne de de la délicatesse propre à sa culture qu’on retrouvera dans tous ses travaux. Il apprend à manier le pinceau, à le faire danser sans contraintes, susurre avec des couleurs ses rêves d’harmonie et de pureté. En 1948, il s’installe en France dans le quartier de Montparnasse et y mène une vie ascétique. Ce pays deviendra le sien. Il en prendra la nationalité. L’exposition témoigne de cette époque effervescente faite de rencontres. Dès le début du parcours, nous sommes accueillis par une série de portraits et d’autoportraits, qu’on aurait bien tort de négliger, mais aussi par ses natures mortes peintes à l’huile dans les années 50.
Cependant, les pièces maîtresses de l’exposition sont sans doute ses importants diptyques, réalisés à partir du début des années 70. La diversité des pièces montrées permet de nous faire découvrir toutes les facettes de l’art d’un homme qui fit de la perfection de son expression une obsession. Rigoureusement engagé à sonder son monde, T’ang Haywen a fait de sa vie une vocation. Peu d’artistes ont en effet su atteindre par la représentation picturale une telle harmonie entre le vivant et l’humain. Ses travaux constituent la parfaite jonction entre occident et Orient, entre la forme et l’informe, le noir et le blanc, le vide et le plein. En explorant la force du monochrome et l’énergie vivifiante de la calligraphie, T’ang Haywen nous emmène avec lui dans un long voyage mental.
T’ang Haywen se laisse porter par la couleur et la spontanéité, caresse les étoiles et les lisières avec son regard contemplatif et profondément sensible. Le ciel s’ouvre et le sol se confond avec la mer, l’encre file sur le papier comme un souffle sur le vent. C’est un spectacle de beauté.
Musée Guimet
- Adresse : 6 place d'Iéna
- Code postal : 75016
- Ville : Paris
- Pays : France
- Tel : 01 56 52 53 00
- Site Internet : https://www.guimet.fr/