Du 5 au 28 octobre, la galerie Lee présente l’exposition Survivre de l’artiste peintre Theanly Chov ; des portraits en pied, sur fond neutre toujours bichrome, de Cambodgiens d’aujourd’hui.
Ils ont tous les âges, tous les styles vestimentaires et toutes les conditions, de l’ouvrier à la grand-mère. Les réunissent toutefois leurs mines soucieuses, concentrées, et surtout leur posture commune d’élévation – bras tendus en arrière, yeux tournés vers le ciel. Vers quoi s’élancent-ils ? Vers la surface, semble dire la juxtaposition des deux couleurs du fond, marquée pile hauteur de visage, mais aussi le titre de l’exposition « Survivre ». Vers l’oubli et la résilience, pourrait suggérer leur regard systématiquement tourné vers le gauche (le passé ?), et ce que nous savons de l’histoire récente du Cambodge, d’où le peintre est originaire. Un Cambodge meurtri entre 1975 et 1979 par les massacres de masse du régime des Khmers rouges – puis par des décennies de guérilla et de pauvreté. « Nous les Cambodgiens, nous ne pouvons que maintenir notre tête hors de l’eau, confirme Theanly Chov. Nous avons perdu notre confiance en la qualité de la vie. »
Né en 1985 dans la province de Battamband, le peintre n’a pas connu la férocité de Kampuchéa. Ses huiles sur toile, qui connaissent depuis quelques années un retentissement international (elles ont été notamment exposées aux Etats-Unis, à Singapour et dernièrement à Lille), en portent pourtant les stigmates. L’empreinte cauchemardesque des Khmers rouges s’y marque d’abord par le soin porté à chaque détail. La veine des portraits de Theanly Chov est résolument réaliste : de la propagande soviétique à la peinture russe du XIXe siècle, en passant par l’oeuvre de l’artiste khmer Neak Dhim, la force réside dans le détail. Un réalisme redoublé par le choix de ses modèles : la plupart sont des amis ou des connaissances, que Theanly Chov représente dans toute leur quotidienneté, avec leurs tatouages, leurs chaussures de sport, leurs jeans et leurs sweatshirts. Dans cet univers tangible, le dispositif retenu par l’artiste – ce flottement du modèle sur fond abstrait – confère pourtant à ses oeuvres une portée presque irréelle. Ou comment sceller l’ambiguïté de son oeuvre, et offrir au visiteur toute sa liberté d’interprétation.
Vernissage le jeudi 5 octobre.
Crédit visuel : Theanly Chov, Survivre, huile sur toile, 69 x 99 cm.