Blue – Sean Scully à la Galerie Thaddaeus Ropac

Depuis le 29 novembre, les murs de la galerie Thaddaeus Ropac à Paris sont revêtus de bleu à l’occasion de l’exposition personnelle de Sean Scully. Plus qu’une démonstration de la maîtrise du peintre des gammes chromatiques, cet accrochage est pourvu d’une dimension émotionnelle forte. Il considère cette couleur comme l’élément qui lui a permis de développer sa sensibilité artistique jusqu’à trouver sa vocation. Cette ode au bleu se poursuivra jusqu’au 17 janvier 2026.

///Melian Pussey

 

 

Sean Scully est né en 1945 à Dublin et grandit à Londres. Il entame une formation artistique dès les années 1960, étudiant d’abord à la Croydon School of Art avant de rejoindre l’université de Newcastle en 1968. Au cours de sa jeunesse, il découvre l’abstraction et nourrit son imaginaire géométrique grâce à ses déplacements, au Maroc lors d’un voyage, et aux États-Unis dans la poursuite de son éducation. L’année 1980 marque son installation définitive à New York. Durant sa carrière, il réalise de nombreuses peintures abstraites, d’abord minimalistes, avant de se tourner vers les modes d’expression plus spirituels de l’abstraction émotionnelle. Ses tableaux rencontrent un vif succès auprès du public et des institutions, bénéficiant d’une visibilité internationale.

 

Avec Blue, la galerie réunit un ensemble de neuf peintures de la série Wall of Light (2024), réalisées sur cuivre et déclinées en variations de bleu. Ces compositions, que l’artiste compare volontiers à des structures mémorielles, résonnent comme autant d’échos de sa jeunesse. Un échange de Sean Scully avec le poète et critique d’art Kelly Grovier est révélateur de son rapport particulier avec les teintes bleutées : le peintre considère que sa relation avec l’art a commencé dès sa prime enfance. Le bleu céruléen de son vélo constitue un souvenir fondateur qu’il évoque. La couleur devient, ainsi, le réceptacle de ses émotions, un lieu où se cristallisent fragments biographiques et impressions fugitives.

La dimension picturale se double également d’un dialogue avec l’histoire de l’art. Les tonalités méditerranéennes évoquent Matisse, tandis que certains bleus plus intenses convoquent la mélancolie de la période bleue de Picasso. Le support en cuivre, laissé visible entre les strates de peinture, apporte une incandescence, comme si chaque œuvre était éclairée de l’intérieur. Wall Blue Blue  (image mise en avant) [1] représente un exemple où la réserve de cuivre apparaît clairement. 

L’ensemble est accompagné d’une pièce monumentale de la série Landline, amorcée en 2013, où Scully explore un horizon recomposé en strates successives. Cette autre manière d’aborder le paysage, par le langage méditatif de l’abstraction, prolonge la réflexion de Wall of Light  avec une incorporation de couleurs chaudes. Landline Vermillion Grey a été réalisé sur aluminium en 2025, faisant de cet ensemble d’horizons composés l’une des productions les plus récentes du corpus. 

Poétique, introspective et lumineuse, l’exposition Blue révèle un artiste qui fait de la couleur un territoire affectif et un espace de mémoire.

 

Notes : 

[1] Sean Scully, Wall Blue Blue, 2024, Huile sur cuivre, 70 x 70 cm  (SCU 1169) | Courtesy of Thaddaeus Ropac gallery, London · Paris · Salzburg · Milan · Seoul © Sean Scully