Bellini : entre imitation, influence et rayonnement

Bellini : entre imitation, influence et rayonnement

Du 3 mars au 17 juillet 2023, le musée Jacquemart-André présente l’exposition Giovanni Bellini. Influences croisées, la première exposition en France consacrée à l’œuvre du grand maître fondateur de l’école vénitienne. L’événement met en lumière à travers une cinquantaine de tableaux le travail original de l’artiste italien mais aussi et surtout les influences artistiques qui ont imprégné son langage pictural.

/// Lolita Fragneau

Si cela fait plusieurs semaines que l’exposition sur le peintre Giovanni Bellini (vers 1435-1516) est disponible, il ne faut pas s’attendre pour autant à voir moins de personnes dans l’enceinte du prestigieux et néanmoins intimiste musée. Dès l’ouverture, les visiteurs se pressent pour admirer les tableaux du maître dont la reconnaissance par les historiens de l’art fût pourtant traînante. Les commissaires de l’exposition Neville Rowley – conservateur des peintures et des sculptures italiennes des XIVe et XVe siècles – et Pierre Curie – conservateur général du patrimoine et spécialiste de peinture italienne et espagnole du XVIIe siècle – expliquent dès l’entrée qu’à ses débuts, Bellini était davantage expert en copie des œuvres de son père plutôt qu’en création à part entière. Il s’inspirait avant tout de l’art de ses proches, tels que son frère ou son beau-frère Andrea Mantegna (vers 1431-1506), qui sont d’ailleurs mis en avant dans la première salle de l’exposition.

Gentile Bellini, Annonciation, vers 1464-1465, tempera et or sur panneau, 133 x 124 cm, Museo Thyssen-Bornemisza, Madrid, © Museo Nacional Thyssen-Bornemisza. Madrid

Vers 1475, l’art de Giovanni Bellini prend un nouveau tournant en s’inspirant davantage du goût flamand et de son attrait pour la technique de la peinture à l’huile. Le tableau Le Christ bénissant (vers 1480) de Hans Memling est présenté dans la section « Entre Nord et Sud » pour mettre en avant cette influence. De même, l’art byzantin, et plus particulièrement les Madones byzantines, marque ses représentations de Vierges à l’Enfant. Ce seront les innovations de ses meilleurs élèves – et notamment Giorgione et le Titien – qui pousseront le vieux Bellini à réinventer son style.

Un chapitre est consacré au peintre sicilien Antonello de Messine (1430-1479), considéré comme un vrai « alter ego » du maître vénitien et mettant en parallèle les œuvres des deux artistes : le célèbre Christ mort soutenu par deux anges, réalisé par Bellini vers 1470-1475 a ainsi été repris par son confrère vers 1476 qui adopte largement ses idées, lorsque les compositions des portraits d’Antonello de Messine inspirent grandement son collègue.

Giovanni Bellini, Christ mort soutenu par deux anges, vers 1470-1475, détrempe et huile (?) sur bois, 82,9 cm × 66,9 cm, Gemäldegalerie, Berlin, © Staatliche Museen zu Berlin, Gemäldegalerie / Christoph Schmidt

Dans la salle suivante, le visiteur peut admirer l’illustre Ecce Homo (vers 1500) d’Andrea Mantegna, qui s’inscrit dans la Devotio moderna – ce rapport d’empathie établit entre le spectateur et les figures du sacré représentées – une notion qui marqua profondément l’art de Bellini qui utilise à l’instar de son beau-frère des cadrages très resserrés pour représenter le Christ de douleur. La section « Le paysage, entre rêve et réalité » met également en exergue le lien avec le jeune Cima da Conegliano (1459-1517), dont les paysages sont imprégnés de détails et de couleurs franches qui insuffle à Bellini le désir de rendre ses propres arrière-plans plus minutieux et topographique. Vierge à l’Enfant (vers 1500) de Cima da Conegliano entre ainsi parfaitement en résonnance avec la Sainte Conversation Giovanelli, peinte à la même époque par Giovanni Bellini.

L’exposition se clôt par le « testament pictural » de l’artiste vénitien – qualifié par Roberto Longhi d’œuvre inaugurale de la peinture moderne –, La Dérision de Noé (vers 1513), représentant le patriarche qui a sauvé l’humanité́ du Déluge. Celui-ci n’est pas triomphant, mais nu, ivre et endormi, présenté presque comme une raillerie de l’artiste lui-même. A partir de ce chef-d’œuvre incontournable et de la reconnaissance de certains de ses élèves comme le Titien (1488-1576), il devient une référence incontestée pour nombre d’artistes vénitiens, et une figure emblématique de l’art de la Renaissance.

Giovanni Bellini, La Dérision de Noé, vers 1513-1515, huile sur toile, 103 x 157 cm, Musée des Beaux-Arts et d’Archéologie, Besançon, © Leonard de Selva/Bridgeman Images

Musée Jacquemart-André

  • Adresse : 158 boulevard Haussmann
  • Code postal : 75008
  • Ville : Paris
  • Pays : France
  • Tel : 01 45 62 11 59
  • Site Internet : www.musee-jacquemart-andre.com
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Musée Jacquemart-André

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