Pendant encore quelques jours, ce jusqu’au 31 octobre, l’artiste et théoricien Anatoly Osmolovsky présente Bonbons toxiques à la Galerie Robert Vallois, sa première exposition personnelle en France. Il incarne l’une des voix critiques de l’art russe, cherchant à aborder au travers de ses travaux les fractures de nos sociétés contemporaines.
///Melian Pussey
Anatoly Osmolovsky est né en 1969 à Moscou. Il est un artiste, un commissaire d’exposition, un théoricien de l’art et un professeur travaillant et vivant aujourd’hui à Berlin. Il est connu pour avoir fondé et contribué à l’idéologie de l’actionisme politique moscovite. Dans un premier temps, Il se spécialise dans la performance, avant de se consacrer dès les années 2000 à la création d’objets d’art. Sa production se veut politique, faisant écho aux sujets auxquels il s’est toujours intéressé (pouvoir, idéologie, langage…) et aux actions radicales lui ayant valu d’être inscrit comme “agent étranger” en Russie. De 2011 à 2024, il gère son institut d’art contemporain BAZA, dont il est le fondateur [1]. 2024 marque l’année de sa perquisition par le FSB (Service fédéral de sécurité de la fédération de Russie) à Moscou, évènement le poussant à s’exiler du pays.
Bonbons toxiques constitue une occasion de découvrir sa production des années 2010 à 2025. La Galerie Vallois présente, en effet, cinq séries d’œuvres récentes. Le titre fait référence au détournement de la perfection formelle, perfection incarnée par la brillance des surfaces et la rigueur géométrique. L’idée semble d’utiliser plusieurs matières (bronze, pain, papier) pour un objectif formulé en les termes suivants : “ révéler les poisons idéologiques qui s’y dissimulent”. L’artiste se place, ainsi, en témoin de son époque, cherchant plus à l’enregistrer qu’à la commenter.

Dans deux séries, le bronze est mis à l’honneur. Celle de 2016, intitulée « Produits », propose une reproduction miniature de modèles contemporains de tourelles de chars d’assauts. L’éclat magnifiant ces objets est perçu comme une façon de questionner notre rapport esthétisé avec les images militaristes, rapport existant ce malgré la conscience que nous avons de la violence qu’elles représentent.

Ce matériau est également employé pour la création de bustes rassemblés sous le titre parlant C’est vous qui avez fait ça ? Non, c’est vous qui avez fait ça ! Il s’agit de têtes de révolutionnaires morts, mises en scène de manière à évoquer les exécutions publiques de l’Antiquité. Anatoly Osmolovsky joue sur l’ambiguïté de ce type de représentations. De telles installations peuvent, en effet, renvoyer à un iconoclasme libérateur, ou au contraire au deuil silencieux d’un héritage révolutionnaire.

Avec ses séries Filigranes et Dossier, il s’attaque à l’univers bureaucratique. Celui-ci devient un champ de bataille avec des chenilles de char et tourelles en papier et en carton. L’ambivalence d’un espace quotidien est retranscrite en associant la guerre au domaine de l’administration.

Sa série la plus récente Les Pains n° 20 (2025) est également exposée. En adéquation avec sa dénomination, elle met en avant des tranches de pain sculptées. Ces productions abordent la transformation de l’ornement et du sacré en un outil idéologique.

Notes :
[1] Anatoly Osmolovsky : Bonbons toxiques, Andreï Erofeev, Jean-Hubert Martin et Anatoly Osmolovsky ( Paris Galerie Robert Vallois, du 07 octobre au 31 octobre 2025), page 103.
Galerie Robert Vallois
- Adresse : 35 Rue de Seine
- Code postal : 75006
- Ville : Paris
- Pays : France
- Site Internet : https://www.galerierobertvallois.fr/modernecontemporain