La Galerie Lazarew présente les œuvres du duo parisien Evrard & Koch, pour le troisième volet de Hors cadre, du 10 mars au 28 avril 2018.
À mi-chemin entre sculpture, architecture et installation, les œuvres d’Evrard & Koch sont difficilement classables. Mais pourquoi vouloir absolument tout classer ? Elles appartiennent à l’instant, à l’espace, à la perception de celui qui les contemple.
Les couleurs des tableaux de Piet Mondrian se sont échappées, le blanc de Robert Ryam s’est évadé de sa toile, pour se retrouver, réunis, sur les œuvres de Evrard & Koch. Les lignes noires qui définissent normalement les couleurs qui composent la peinture du maître de l’abstraction ont acquis un nouveau rôle. Elles délimitent désormais l’espace : les bordures en reliefs, cassées et pliées, sont soulignées par un noir profond, insistant sur la tridimensionnalité de l’œuvre. Cette palette de couleurs s’apparente à un champ de bataille, une lutte organisée pour l’emporter sur le blanc dominant, où le mouvement harmonieux et géométrique des formes s’imbrique, tel un Tetris, à la perfection.
Accrochées directement au mur blanc de la pièce, les œuvres semblent émerger, telle une excroissance, des profondeurs du béton. Le relief de l’œuvre contraste avec la planéité de la surface et provoque une sensation de vertige, où des formes à la Yaacov Agam se placent dans la continuité de l’art cinétique.
Un relief qui ne peut être apprécié que par le mouvement de notre corps. Face à l’œuvre, nous pouvons discerner les couleurs qui s’imbriquent, des ombres qui se créent et nous soupçonnons une triple dimension. Mais c’est en nous déplaçant sur le côté, que nous saisissons toute la notion de Hors Cadre. L’œuvre ne dépend plus de son support, les rôles se sont inversés pour laisser place à l’indépendance de la structure qui évolue seule. Suivant l’heure de la journée et la luminosité émanant des rayons du soleil, l’œuvre se modifie et franchie les limites de l’espace que le duo d’artistes lui avait attribué. Les ombres s’étendent autour des angles géométriques, les couleurs fluorescentes se reflètent dans le blanc du mur, et tel un mirage, une nouvelle œuvre éphémère se créée aux dépens de la fugacité de la lumière.
Avec Hors Cadre #3, Evrard & Koch redéfinissent la place de l’artiste au sein de la création. L’indépendance, la liberté de l’œuvre sont mises au premier plan : la sculpture se modifie au grés du temps, elle n’a plus besoin d’une main humaine pour se transformer. Ces œuvres émanent des murs, telle une force vivante, et se déplacent pour occuper l’espace usant des outils naturels que sont la lumière et le temps.
Texte : Angèle Imbert
Crédit Visuel : Evrard & Koch, Hors Cadre #3.7, Carton bois, poli miroir, acrylique et pigments, 155 x 96 x 23 cm, 2018