“Cette montre qui figure sur ce tableau, c’est ma grand-mère qui me l’a donnée. Elle avait décidé de partir à l’étranger librement, ce qui a fait scandale à l’époque. Aujourd’hui c’est moi qui la porte”. Un sourire lumineux aux lèvres, Renske Linders lève le voile sur le mystère de ses toiles et nous explique toutes les histoires qui les composent. Réflexions personnelles, images symboliques ou encore références antiques viennent composer ce voyage complètement métaphorique qu’elle nous propose.
Fantastique jeu de piste énigmatique, l’exposition “Revenge dress” comprend une série de toiles majoritairement en petit format au cadrage photographique. Profondément féministe, ou plutôt humaniste, l’artiste s’amuse à pointer tout en légèreté les ironies qui composent notre monde moderne. La peinture est de facture très douce et hyperréaliste, elle se pare parfois d’inspirations classiques. Ce qui prime ici est l’intérêt porté aux détails, l’extrême raffinement d’une eau dont on perçoit les reflets ou d’un sein rond et délicatement ombré.
Renske Linders nous fait part de son rapport aux objets du quotidien et aux injonctions qui façonnent la société. Son souci du cadrage particulier systématique charge chacune de ses œuvres d’un grand mystère qu’aucune clé ne vient éclaircir. La volonté n’est pas d’être dogmatique ou d’imposer un éclairage didactique. Les peintures de l’artiste viennent titiller malicieusement plutôt que sermonner durement. La volonté est d’ouvrir à l’échange, au partage intime, à l’éveil. Ses peintures en petit format sont des aphorismes visuels : une réflexion peut émerger tout en gardant assez de saveur poétique pour laisser le visiteur construire une interprétation personnelle.
Avec “Zeus Bra”, par exemple, elle représente un soutien gorge enraciné sur une peau sur lequel figure la scène du célèbre mythe de Léda, violée par Zeus dans certaines versions. “Je voulais montrer la façon dont nous gardons en tête et normalisons certains récits jusque dans notre chair et à quel point cela influence nos vies quotidiennes”, explique-t-elle. La toile “Taille XXS” représente avec humour un plat de spaghettis gourmand parsemés de pilules amincissantes. Une façon de montrer l’absurdité de la pression sociale exercée sur les femmes pour atteindre des standards de beauté irréalistes dans un monde qui pousse à la consommation de nourriture à outrance tout en exigeant la maigreur maladive.
Bikinis, escarpins ou vernis… Renske Linders reprend les codes de la féminité pour mieux les détourner, pour le bien de l’humanité, et pour nous montrer qu’un autre monde de liberté est possible.
Galerie d’Eylau
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