Pour mieux raconter le monde arabe et ses individus, l’exposition Parfums d’Orient à l’Institut du Monde Arabe rend hommage à la parfumerie orientale. Jusqu’au 17 mars 2024, ce parcours immersif, jalonné d’installations olfactives, transporte les visiteurs dans un voyage sensoriel à la découverte de traditions enracinées depuis plusieurs siècles.
/// Nora Djabbari
Et si l’Orient vous était conté…par le nez ? L’Institut du Monde Arabe vous enveloppe dans un monde vaporeux à la découverte des plus célèbres parfums du Moyen-Orient. De la splendeur des fragrances pharaoniques aux effluves musquées, des notes ambrées aux épices exotiques, vous êtes conviés à une odyssée sensorielle qui trace son chemin des confins de l’Arabie jusqu’aux horizons lointains de l’Europe et de l’Asie.
Quoi de mieux qu’un parfum pour vous plonger dans une ambiance, dans le raffinement enivrant de l’Orient ? L’Institut du Moyen-Orient met en lumière les multiples facettes olfactives qui ont façonné cet espace où la passion pour le parfum résonne à travers les millénaires. Conçue comme une déambulation immersive, l’exposition vous transporte à travers des espaces variés, vous invitant à parcourir la campagne méditerranéenne et le Proche-Orient, puis à vous élever jusqu’aux sommets des majestueuses montagnes himalayennes, sources autrefois inépuisables des précieux ingrédients parfumés. Ici, l’ambre gris et la myrrhe, tous deux enfants de la terre aride d’Arabie, se mêlent harmonieusement aux autres fragrances présentent dans l’imaginaire des merveilles célébrées par les plus grands poètes arabes.
Retour sur tout un pan d’histoire
Le parfum est un instrument particulièrement enrichissant pour l’étude des sociétés. Structurée en sections thématiques, l’exposition explore successivement divers aspects de son utilisation, qu’il s’agisse de son rôle religieux, commercial ou domestique. “Parfums d’Orient” nous parle notamment du perfectionnement du processus de distillation par les Arabes à partir du IXème, ou encore l’importance symbolique des odeurs au sein de la société arabe.
L’histoire se donne toujours à voir grâce à un panorama visuel large d’objets conçus pour accueillir les fragrances. Les visiteurs auront l’occasion d’apprécier le raffinement de pièces telles que des brûle-parfums en verre soufflé ou des flacons cristallins subtilement ornés de perles, témoignent ainsi toutes d’un savoir-faire artisanal unique transmis par des générations successives.
Une scénographie immersive
L’exposition Parfums d’Orient, incontestablement l’une des plus belles de l’année 2024, sait transporter grâce à une scénographie travaillée, révélant la richesse olfactive des senteurs du monde arabe par tous les sens. Intégrer des éléments sensoriels au sein d’une exposition ?
Une entreprise demandant un effort technique et une préparation minutieuse auquel s’adonnent encore peu de musées, mais qui fait sens, comme l’indiquent les commissaires d’exposition Hanna Boghanim et Agnès Carayon : “Que serait une exposition sur les parfums si on ne peut les sentir ? Le parcours est envisagé comme une conjugaison des sens, où l’odorat raconte tout autant que la vue. Des dispositifs olfactifs inventifs invitent le visiteur à s’immerger dans les senteurs créées spécialement par le parfumeur créateur, Christopher Sheldrake”. On aurait pu craindre une saturation olfactive, mais celle-ci est habilement contournée par un parcours incitant au déplacement, grâce une disposition stratégique des ressources.
Une exposition qui ravit le nez, donc, mais qui ne boude pas le plaisir des yeux. Agrémenté de création contemporaines évocatrices, l’exposition convoque systématiquement par les images ce qu’elle amène à faire sentir, comme avec un étonnant tapis d’épices de l’artiste Laurent Mareschal. Plongé dans une demie pénombre, le visiteur franchira des alcôves mystérieuses, découvrira des robes en bouton de jasmin et humera les effluves alléchantes émanant d’une cuisine familiale. Toujours accompagné des voix feutrées surgissant de dispositifs audio ou vidéo qu’il choisira de déclencher grâce à ses pieds, il apprendra les récits et les traditions se cachant derrière chaque note.
Un parcours ludique
Certains pourront noter que l’exposition adopte un point de vue orientaliste. Elle n’en demeure pas moins ludique. Pensée en prenant en compte la dimension conviviale du parfum, l’exposition propose en plus des deux cents œuvres présentées pas moins de trente et une odeurs conçues par le parfumeur Christopher Sheldrake, ainsi que trois œuvres contemporaines olfactives. Dès le début du parcours, des cloches cylindriques invitent à presser un bouton. C’est alors un festival de pétales qui s’envolent, entraînant poétiquement le déclenchement d’odeurs de rose, de jasmin et de safran…
L’installation « Le secret du Parfum » permettra de sentir par différentes étapes les notes composant trois parfums. L’un, composé de Kyphi, s’inspire d’une recette égyptienne antique. Plus loin encore, dans la section consacrée aux odeurs de la maison, des dispositifs soufflants nous font redécouvrir des senteurs familières allant de la fleur d’oranger à la cannelle en passant par la coriandre, nous rappelant ainsi que les ingrédients des parfums d’orient s’intègrent également parfaitement dans l’alimentation.
Finalement, en laissant derrière eux l’Institut du Monde Arabe, les visiteurs partiront avec bien plus que des images figées, mais avec un souvenir planant et puissant, ultimement marqués par une empreinte parfumée qui continuera de les envelopper longtemps après avoir quitté les lieux.
Institut du monde arabe
- Adresse : 1 rue des Fossés-Saint-Bernard
- Code postal : 75005
- Ville : Paris
- Pays : France
- Site Internet : www.imarabe.org
