Simon Hantaï, Paris 1948-1955

Simon Hantaï, Paris 1948-1955

L’exposition Simon Hantaï, Paris 1948-1955, présentée à la galerie Jean Fournier du 14 décembre au 20 janvier, nous invite à nous plonger dans une période méconnue de l’oeuvre de l’un des plus grands peintres français du second XXe siècle : ses débuts prolifiques dans le Paris de l’après-guerre. 

Du peintre franco-hongrois Simon Hantaï (1922-2008), on connaît et admire surtout les oeuvres produites entre 1960, année de l’invention du « pliage par méthode », et 1982, qui marque la fin de sa production artistique. La galerie Jean Fournier choisit pourtant de mettre à l’honneur cet hiver la production de ses débuts. L’exposition Simon Hantaï, Paris 1948-1955, dont le commissariat est assuré par Marc Donnadieu, nous montre comment ces années d’expérimentation intensive ont pu engendrer la richesse et la diversité du vocabulaire pictural qui a été porté à son apogée durant les deux décennies suivantes. Ces peintures n’ont cependant pas été sélectionnées pour une quelconque valeur documentaire ou historique : au contraire, ce sont bien leurs formes organiques proliférantes, leur densité de textures et de couleurs et leurs glissements surréalistes entre figuration et abstraction qui capturent immédiatement l’oeil du spectateur. 

En 1948, Simon Hantaï arrive à Paris après un voyage en Italie durant lequel la peinture médiévale siennoise l’a fasciné. Il prend rapidement part à la foisonnante vie artistique de l’après-guerre, fréquentant tout aussi bien les collections du Musée de l’Homme et du Musée d’art moderne que les peintres contemporains exposés dans les galeries. Henri Matisse, Max Ernst, Alberto Giacometti et bien d’autres nourrissent son regard et l’incitent à pousser toujours plus loin l’exploration de la matière picturale. Marc Donnadieu souligne ainsi que ces quelques années ont concentré des pistes de recherche cruciales pour l’oeuvre du peintre : le pliage, le grattage, l’empreinte, la décalcomanie sont entre autres pratiqués dans son atelier. Elles sont aussi le moment de découvertes et de rencontres essentielles : il côtoie le cercle surréaliste parisien mené par André Breton, est exposé par Jean Fournier qui restera toute sa vie son ami et son galeriste, et s’initie à l’expressionnisme abstrait par le biais des oeuvres de Jackson Pollock.

Il résulte de cette période d’intense activité des créations énigmatiques et foisonnantes, traversées d’influences très diverses. Les formes anthropomorphes grouillantes aux couleurs salies envahissent l’espace de la toile, elles se multiplient, se désagrègent, se courbent et se métamorphosent, plongeant le spectateur dans un monde où ses tentatives de qualification usuelles échouent, où seul prévaut le langage de la couleur qui se meut et  magnétise le regard. Les toiles relèvent ici de l’informulable, de l’automatisme psychique, et à travers cette approche surréaliste, on voit déjà advenir la subtilité de la nuance colorée propre à la touche de l’artiste, un art de la texture picturale que l’oeil ne parvient jamais totalement à épuiser. En témoigne l’envoûtante Femelle miroir, peinte en 1953 et exposée en 1955 par Jean Fournier pour l’exposition Alice in Wonderland, qui marque le début d’un attachement profond à Simon Hantaï qui a très largement contribué à forger l’identité de la galerie. 

 

Vernissage le jeudi 14 décembre de 18h à 20h30

 

Texte : Alix Ricau

Crédit Visuel : Femelle Miroir, 1953, huile sur toile, 165 x 174 cm (65 x 68.5 in.) © Galerie Jean Fournier