/// Yasmine OUYAHIA
Andres Serrano, artiste né en 1950 à New York, convie à un voyage artistique captivant où l’âme de cette époque se dévoile dans toute sa complexité, par le biais d’une œuvre polymorphe mêlant sculpture, photographie et peinture. Avec plus de trente années de création à son actif, Serrano s’impose comme un témoin audacieux de l’Esprit du temps, ce concept philosophique qui englobe le contexte intellectuel, moral et culturel d’une époque. Son art exige que le spectateur regarde, sans détours, les facettes parfois dérangeantes de la société contemporaine, mettant en lumière ses dérives, ses dysfonctionnements et ses violences, dissimulées sous une apparente normalité.
Le travail d’Andres Serrano, au premier abord puissant et parfois perturbant, révèle une fascination pour les grands maîtres du passé. L’histoire de l’art, qu’elle soit picturale ou sculpturale, irrigue son œuvre, qui s’attache à réactualiser des chefs-d’œuvre anciens pour les insuffler dans le présent. À travers ses cadrages originaux, sa palette de couleurs singulière et ses compositions minutieusement retravaillées, l’artiste opère une fusion entre l’héritage artistique classique et la contemporanéité.
Dans l’exposition The Doom of Beauty, Serrano offre un regard inédit sur son travail, explorant un territoire jusqu’alors inconnu de sa carrière artistique. Il revisite de grandes sculptures de Michel-Ange et d’autres pièces antiques grecques et romaines à travers d’immenses tirages photographiques en noir et blanc. Toutefois, cette série se distingue par l’usage de pastels, de crayons et de peinture acrylique pour colorer ces images. Cette incursion dans la peinture, une première depuis ses années d’études à la Brooklyn Museum Art School, a débuté de manière presque instinctive, lorsqu’il a commencé à dessiner sur les photographies d’un livre consacré au sculpteur de la Renaissance italienne. Ces dessins, spontanés et presque inconscients, lui ont permis de briser l’exil qu’il s’était imposé en créant de l’art exclusivement à travers l’objectif de son appareil photo.
Le geste artistique de Serrano, mélange habilement les coups de pinceau aux lignes de chaque sculpture, parfois délaissant les formes pour suivre le chemin aléatoire de la peinture sous l’effet de la gravité. Cette alchimie entre rythmes, matières et contrastes donne naissance à des compositions visuelles envoûtantes. Parmi les œuvres phares de l’exposition, la Piéta de Michel-Ange, située à l’entrée de la Basilique Saint-Pierre de Rome, se décline en trois interprétations intitulées « Emerald Pieta, » « Pieta Orange, » et « Pieta Cadmium Red, » chacune distinguée par la couleur.
Au sein de la galerie, ces portraits anciens s’élèvent à la hauteur des visiteurs, instaurant une proximité qui incite à réfléchir sur la place du sacré, qu’il s’agisse du culte religieux ou de la sacralisation de l’œuvre d’art, dans notre monde contemporain.
Galerie Nathalie Obadia
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