La galerie David Guiraud présente du 4 mai au 21 juin l’exposition Instants d’abandon, rassemblant les photographies de l’artiste Vincent Gouriou.
Le nu. C’est par cette pratique que les étudiants en art commencent à appréhender le dessin et les formes. C’est par cette pratique que Vincent Gouriou nous fait réfléchir sur notre propre corps, notre sexualité et notre condition humaine.
L’hétérogénéité des modèles choisis par l’artiste dénote d’un désir politique manifeste. Homosexuel, transgenre, hétérosexuel, l’objectif du photographe les capture de la même manière, comme pour affirmer la beauté des différences. La douceur de chaque scène nous dévoile une intimité, où les regards laissent paraître un doute, une souffrance enfouie. Ces portraits, pourtant silencieux, laissent dans l’atmosphère des dialogues muets, imaginaires, et nous plongent dans les profondes réflexions des modèles, qui se révèlent dans le plus simple appareil. Mais les corps, ici, ne sont ni exploités, ni sexualisés. C’est avant tout un travail sur les ombres, sur les courbes que dessine la chair, créant l’œuvre à part entière que peut être un dos, un bras, un visage.
Tels des tableaux, les photographies de l’artiste usent de la lumière pour illuminer les corps de ces personnes de genres divers. Pour rendre grâce à chaque pli, chaque rougeur présente sur la peau, Vincent Gouriou éclaire l’enveloppe charnelle par une lueur naturelle : la chair blanche, le teint rosé de ses sujets exhument et contrastent avec un fond oscillant entre une palette de tons gris et de tons noirs. Les nuances de couleurs dépendent alors simplement de la pigmentation de chaque peau. Comme la photographie Camille dans la série Singularité(s), la profondeur du fond dessine une auréole autour du visage de la jeune femme, la transformant, un instant, en une représentation aussi douce que celle de la Vierge dans les tableaux de la Renaissance. Laissant apparaître son profil entouré d’une crinière brune, ses formes voluptueuses nous tournent le dos. La pâleur de sa peau s’oppose à la noirceur de son regard songeur. Nous plongeons dans ses réflexions durant ses Instants d’abandon, ressentons sa douleur, et pendant cette contemplation, nous prenons conscience de la beauté de son corps.
Le travail de Vincent Gouriou est une ode aux différences. Ici, les vêtements ne cachent pas nos complexes enfouis, la lumière n’est pas tamisée par peur d’être exposés. Les chairs ne sont finalement qu’une enveloppe, une barrière entre le monde et l’esprit : l’artiste les place au centre de la photographie, nous revelant la beauté de chacune d’entre elles.
Texte : Angèle Imbert
Crédit Visuel : Série « Singularité(s)», Camille, Vincent Gouriou, courtesy Galerie David Guiraud