Hostess and Guests – Exposition de l’artiste Morgane Ely à la Galerie Prima

Jusqu’au 15 novembre 2025, La Galerie Prima présente l’exposition personnelle de Morgane Ely. Hostess and Guests est consacrée à une série de gravures sur bois mettant non pas des estampes à l’honneur, mais les matrices généralement utilisées pour leur production. Ces matrices-œuvres juxtaposent un univers domestique japonais stéréotypé à des formes reprenant des graffitis croisés à Paris. C’est tout un imaginaire collectif que l’artiste cherche à interroger. 

///Melian Pussey

 

Morgane Ely a produit une série de matrices pensées comme des œuvres d’art à part entière, déviant de leur fonction habituelle de support d’impression de l’image. Ces plaques en bois sont minutieusement gravées, avant d’être bombées et encrées. Leur production mobilise tout un savoir faire que la graveuse a acquis au cours de sa formation artistique entre la France et le Japon [1].

Au travers de ces gravures, l’artiste adopte un regard critique sur les fantasmes et récits stéréotypés entourant la femme japonaise. Le sujet est exploré par le biais de la représentation de figures figées dans un cadre domestique esthétisé. L’idée est de proposer une vision fidèle à un imaginaire occidental, hérité de notre passé colonial, pour le juxtaposer à une esthétique graffiti. Il s’agit de la confrontation de deux univers visuellement et symboliquement opposés. L’urbain se mêle à l’intime, le masculin au féminin, la transgression au fantasme d’individus réduits à des clichés de femmes soumises et silencieuses.

Le graffiti est évocateur d’un mode d’expression urbain, souvent utilisé pour affirmer une présence dans l’espace public. Il faut noter que cette affirmation peut se faire au détriment de corps considérés comme mineurs ou marginaux.

Les motifs que Morgan Ely a extrait des rues de Paris paraissent presque invasifs, rompant l’unité d’une scène. Ceux-ci contrastent avec la minutie du reste de l’ensemble, car les formes sont creusées de manière à laisser des hachures épaisses et irrégulières.  Ces effets sont particulièrement visibles dans les photographies insérées dans la publication, notamment dans la gravure mise en avant, Maiko Girls [2]. 

 

La créatrice perçoit ces ruptures visuelles comme un moyen de relecture de ses images. L’interruption causée par le tag oblige le spectateur à regarder l’œuvre autrement, à saisir les tensions politiques qui se glissent dans l’esthétique. Cette série repose ainsi sur l’ambivalence des images grâce à l’ articulation de nombreux paradoxes :  raffinement et transgression, technique rigoureuse et culture populaire, gravure traditionnelle et détournement critique. Morgane Ely fait de l’agression visuelle une forme de résistance, mise au service de la remise en cause d’imaginaires orientalistes. 

Notes : 

[1] Pour en savoir plus, voir la présentation de l’artiste sur le site de la Galerie disponible au lien suivant : https://galerieprima.com/artists/41-morgane-ely/

[2] Morgane Ely, Maiko Girls, 2025. Gravure sur bois bombée et encrée, 75 X 120 cm. Courtesy de lʼartiste et de la Galerie Prima