Mickaël Doucet : Poétique de l’espace

La Galerie Virginie Louvet consacre une seconde exposition monographique jusqu’au 2 mars 2024 à l’artiste français Mickaël Doucet. Intitulée “Poétique de l’espace”, elle montre une série de huit toiles réalisées entre 2022 et 2023. Dans ses œuvres, l’artiste explore nos rapports à l’espace.

 

/// Nora Djabbari

 

Les toiles de cet artiste peignant des intérieurs sont chargés de silence. Pourtant, aucune austérité n’émane de ses pièces aux couleurs froides, parfois pop. Juste un silence qui nous apaise, nous enveloppe dans un monde lointain à l’abri des bruits et des fureurs. À la vue des ombres projetées et des végétaux, on devine que ce moment d’apaisement n’aura qu’un temps, mais on savoure sans se hâter ce plaisir pictural. Bientôt le soleil se couchera, le jour se terminera et tout recommencera. Mickaël Doucet nous amène dans l’intimité d’une chambre vacancière. À l’ombre d’une plante verte, il nous protège d’un soleil intense tout en nous offrant des fenêtres donnant sur la mer baignée de ses rayons. La lumière se diffuse intensément dans chaque espace qu’il peint. On la voit envahir une statuette, surgir de baies vitrées, traverser les embrasures, déborder du cadre pour se diriger vers nous, spectateur circonspect. On ressent presque le souffle de la brise marine, le murmure des vagues en arrière-plan, les bruits étouffés des vacanciers, sans doute hors du champ, mais surtout, le poids du calme et de la sérénité. Mickaël Doucet nous offre des instants de contemplation où le temps se fige.

 

Ses salons énigmatiques ne sont jamais troublés par la présence humaine. Mickaël Doucet peint des espaces épurés. Seul quelques détails nous prouvent qu’ils sont visités : sur une table repose quelques cahiers, une radio est visible dans un coin, une chemise bleue roi pend du bout d’une poignée de fenêtre… Le titre de l’exposition “Poétique de l’espace” rappelle un ouvrage du philosophe Gaston Bachelard publié en 1957 dans lequel il explore la dimension imaginaire de notre rapport à l’espace. “Ainsi la maison ne se vit pas seulement au jour le jour, sur le fil d’une histoire, dans le récit de notre histoire. Par les songes, les diverses demeures de notre vie se compénètrent et gardent les trésors des jours anciens” disait l’épistémologue. Les chambres de Mickaël Doucet sont visitées mais non habitées. Elles constituent des sanctuaires hors du temps, des fantasmes, des souvenirs à la précision cinématographique.

L’aspect énigmatique des toiles est renforcé par une grande maîtrise du cadrage et de la composition. Mickaël Doucet sait calibrer notre regard vers les horizons. La simplicité des formes géométriques qu’il construit nous apporte un sentiment d’harmonie et d’équilibre. L’artiste s’intéresse au Japon et à l’esthétique zen et cela transparaît dans toutes ses toiles. Pour cette exposition, Mickaël Doucet introduit la technique du fusain sur huile sur toile.

L’artiste joue avec notre perception en opérant des mises en abyme. Il représente sur ses tableaux des tableaux. Cela provoque une profusion de formes, notre regard se perd dans la géométrie, notre esprit rêvasse. Le spectateur se trouve ainsi transporté vers des horizons intérieurs où le réel et l’illusion s’entremêlent harmonieusement, offrant un moment d’immersion paisible.