Olivier de Sagazan questionne la vie à la Galerie Marie Vitoux

Impossible de ne pas flancher devant ces figures solitaires et hagardes aux yeux estropiés. On sent une certaine tendresse, un combat intérieur qui nous émeut. Au milieu de ces salles aux murs de pierres, ces petits personnages horrifiques se déploient. Les peintures répondent aux sculptures qui trônent au milieu des pièces, devenant leur matérialisation évidente dans le monde réel. Cet accrochage sur deux étages est également nourri d’une performance théâtrale exubérante, évoquant des travaux d’Olivier de Sagazan.

Notre regard pénètre les corps squelettiques et vogue à travers leurs estomacs béants. Ces créatures qui semblent sortir des Hadès nous emmènent dans un monde angoissant fait de liberté. Découvrir le travail d’Olivier de Sagazan, c’est indéniablement vivre une expérience contrastée, d’une beauté affreuse qui vous prend aux tripes. La peur et la compassion nous engagent émotionnellement, tant les formes et les regards frappent, questionnent. Quelle est donc la cause du tourment qui semble toucher ces figures ? Muettes, presque enfantines, elles tentent de nous parler, grâce à leur yeux enfoncés qui révèlent un chagrin mystérieux. Les secrets nous empoignent tout au long du parcours mais la réponse à nos questions se trouve sans doute en chacun de nous. 

Olivier de Sagazan est né au Congo en 1959. Très vite, il développe une obsession pour la vie et la matière, influencé par sa formation de biologiste. Il fait parler les corps en jouant avec la profondeur, avec la juxtaposition des couches de couleurs et des éléments organiques.

“Peindre c’est danser” est sa devise. L’artiste compose ses tableaux comme il composerait une partition de musique. Il appose sur ses toiles, sur le papier ou sur ses sculptures des contrastes ou des éclaboussures de couleurs, créant des ensembles où la danse du pinceau se prolonge indéfiniment. C’est ainsi qu’Olivier de Sagazan décrit l’ambition de sa technique : “Peindre c’est lancer son corps dans la bataille, muni de matières et de couleurs. Tout l’enjeu de la peinture est de sauvegarder l’intranquillité du geste qui, au moment de son apparition, se découvre à lui-même”.

Ses travaux sont extrêmement marqués par l’esthétique expressionniste et par le goût pour la performance. Ils laissent une grande place au mouvement, à la liberté du geste, à l’importance de l’émotion. C’est ce que Marie Vitoux, galeriste, décrit comme une énergie “vitale, spontanée, incarnée”. Au gré du mouvement, Olivier de Sagazan tisse des récits visuels sanglants. La galerie revient sur son écriture picturale en exposant un ensemble de croquis, témoins du travail de l’artiste et des premières ébauches des gestes de ses personnages. Indéfinissables, effrayantes mais d’une complexité fascinante, les figures d’Olivier de Sagazan insufflent à leurs visiteurs une énergie morbide de vitalité.