Du 16 octobre 2020 au 14 mars 2021, le musée des Beaux-Arts de Nantes présente l’exposition « L’hypnose ».
/// Stéphane Gautier
L’hypnose endort, l’hypnose fait peur, l’hypnose amuse. L’hypnose n’est pas souvent convoquée dans les musées, probablement pour ces trois raisons réunies. Pourtant l’hypnose est omniprésente, de manière délibérée ou inconsciente, dans le champ de la création. De Gustave Courbet à Auguste Rodin, en passant par Salvador Dali ou encore Fritz Lang, l’exposition que le Musée des Beaux-Arts de Nantes consacre à ce sujet explore pour la toute première fois une histoire culturelle de l’hypnotisme de Mesmer à aujourd’hui, et les liens étroits que les pratiques artistiques ont entretenus avec l’histoire de l’hypnotisme, de la fin du XVIIIe siècle à nos jours.
L’hypnose connaît aujourd’hui un net regain d’intérêt dans la culture scientifique et les imaginaires populaires. Mais peu de cas est fait du rôle qu’elle a pu jouer dans l’art. Hypnose, couvre tout le champ des arts visuels et vivants : de la peinture à la sculpture, du cinéma à la performance, explorant ainsi l’intérêt des plasticiens, musiciens ou danseurs pour les modes de transmission de l’émotion sous état modifié de conscience.
Suivant un parcours chronologique, s’ouvrant de la fin du XVIIIe siècle pour conclure avec la création contemporaine, l’exposition revisite quatre siècles durant lesquels les théories et les pratiques de l’hypnose ont peu à peu été investies par les artistes. Le parcours se divise en huit sections, chacune mettant en avant une grande diversité d’objets et de supports (peintures, gravures, photographies, vidéos…), rythmée par des projections de films (Docteur Mabuse le joueur de Fritz Lang, Anemic Cinema de Marcel Duchamp…). Ainsi le visiteur peut découvrir le véritable Baquet de Franz Mesmer aux vertus thérapeutiques, tant adulé que critiqué, des représentations des expériences de la Salpêtrière, des créations de Gustave Courbet, Auguste Rodin ou encore Salvador Dali, William Wegman, Alain Séchas, Larry Miller…
Une installation multimédia de l’artiste américain Tony Oursler, spécialement conçue pour cette exposition, s’empare de la Chapelle de l’Oratoire. Des saynètes vidéo, proches de l’esprit du cinéma des premiers temps, animent un décor peuplé de multiples objets, sculptures et écrans. Tony Oursler y mêle de multiples références visuelles à l’histoire de l’hypnotisme et diverses angoisses contemporaines liées aux technologies numériques.
L’installation est constituée d’une douzaine d’œuvres où sculptures et art vidéo interagissent. On y retrouve par exemple Franz Mesmer et sa caricature, un âne hypnotisant une patiente, Magnetic Tree, un arbre de quatre mètres de haut qui fait référence à l’arbre que Puységur avait magnétisé et auquel les patients se reliaient par des ordres pour guérir, ou encore une pièce faisant référence à la Beat Generation et à la Dreammachine de Brion Gyson, produisant un phénomène visuel troublant provoquant la détente, à la façon d’une séance d’hypnose.
Tony Oursler, en grand virtuose de l’installation immersive fantasmagorique, plonge le spectateur dans un expérience sensible et spectaculaire, questionnant l’attention du public, la distraction et l’emprise.
Né à New York en 1957, Tony Oursler est une figure majeure de la scène artistique américaine. C’est à Cal Arts (California Institut of Arts) qu’il réalise ses premières bandes vidéo et qu’il rencontre l’artiste Mike Kelley avec lequel il fonde en 1977 un groupe de punk-rock expérimental, The Poetics.
Au sein de l’art vidéo, Tony Oursler fait appel à une forme de théâtralisation qui hybride une grande variété de médiums : vidéo, film, photographie, peinture, sculptures mais aussi bandes musicales et sonores qui font l’objet d’un travail spécifique. Il a très tôt étendu la conception de l’écran à des supports inusités, à l’échelle de l’architecture et de l’espace public mais aussi, sur des mannequins de chiffons (les fameux « dummies » ou poupées qui apparaissent en 1992 et qui l’ont rendu célèbre sue la scène artistique internationale), dans des installations narratives et spectaculaires, constituées de décors à caractère burlesque et parfois tragique.
Ses œuvres figurent dans les plus grandes collections, comme celle du Centre Pompidou. Son travail a récemment été présenté au Moma de New York, donnant lieu à l’édition d’un catalogue de sa collection personnelle de documents historiques liés à la culture populaire du divertissement, de l’occultisme et des spectacles de magie.
Hypnose est donc une exposition hypnotique, placée sous le commissariat général de Sophie Levy, directrice du musée d’arts de Nantes et du commissariat scientifique de Pascal Rousseau, professeur à l’université Panthéon-Sorbonne et à l’Ecole des beaux-Arts de Paris, assisté de Louise Denis, historienne de l’art, et Jean-Rémy Touzet, conservateur en charge des collections XIXe au musée d’arts de Nantes.