Le musée Zadkine : Découvrir la maison pour découvrir l’artiste

Pour célébrer son quarantième anniversaire, le musée Zadkine s’offre une toute nouvelle scénographie qui met à l’honneur la maison-atelier de la rue d’Assas à Paris. Plus qu’un simple lieu de vie, c’est dans ce havre chaleureux que naissait le souffle artistique du sculpteur Ossip Zadkine, mais également de son épouse, la peintre Valentine Prax. L’exposition revient sur cette « vie d’ateliers » retraçant par la même occasion la vie du couple. Elle se déroule du 11 novembre 2022 au 2 avril 2023, avec au commissariat Cécile Champy-Vinas – directrice du musée Zadkine – et Pauline Créteur – chargée de recherches à la Bibliothèque nationale de France.

/// Lolita Fragneau

Ossip Zadkine (1888-1976) était un artiste français d’origine russe. Très hétéroclite, il s’est intéressé très jeune à la peinture, sculpture mais aussi à l’écriture tout en s’éloignant des études académiques. Abandonnant rapidement l’école des Beaux-arts, il se forme finalement dans les écoles d’ébéniste où il apprend à travailler le bois. Sa vie fût marquée par les différentes maisons-ateliers qu’il occupa en France et par la relation sentimentale et artistique qu’il entretenait avec Valentine Prax (1897-1981). La première salle de l’exposition tend à présenter ses débuts à Paris dans les premiers ateliers qu’il occupa et à mettre en avant la diversité des matières qu’il modelait.

Le musée dévoile un aspect inédit de l’œuvre de ses collections : son fonds de photographies. Zadkine aimait se faire photographier avec ses œuvres, dans une sorte de mise en scène représentant l’artiste en plein travail. Plusieurs photographies – parfois anonymes mais d’autres fois signées de grands noms de la photographie du XXe siècle comme Marc Vaux ou André Kertész – font entrer le visiteur dans l’intimité du couple d’artistes et tissent un portrait de cette période fructueuse, tout en les mettant en parallèle avec les sculptures de Zadkine ainsi que les peintures de Prax.

La deuxième partie de l’exposition se penche sur l’atelier rue d’Assas, c’est-à-dire l’actuel musée Zadkine. Prax et lui ont un réel coup de foudre pour ce lieu s’y installent en 1928. Ils l’occuperont jusqu’à la fin de leur vie, si ce n’est pendant la Seconde Guerre Mondiale – période funeste où Zadkine, d’origine juive, dû prendre la fuite et s’installa aux Etats-Unis. Valentine Prax a consacré les dernières années de sa vie à défendre et préserver la mémoire de son défunt époux en conservant l’atmosphère si particulière de ce lieu atypique au cœur du quartier de Montparnasse et le transformant petit à petit en musée.

Le parcours chronologique est ponctué de citations, qui sont les souvenirs de l’artiste français issus pour la plupart de Le Maillet et le ciseau (1967) – récemment réédité aux éditions Paris Musées. Le visiteur peut également traverser le jardin, espace de création à part entière, et se retrouve dans l’atelier du jardin, construit dans les années 1950. Son atelier devient à cette période un centre d’enseignements qui forme une nouvelle génération d’artiste. L’esprit de l’atelier de l’époque est restitué grâce à la présentation des outils et d’objets personnels ayant appartenu au sculpteur, comme son accordéon, ses nombreux livres ou encore ses pipes. Ce n’est pas un simple musée que traverse le visiteur, mais un espace à part qui incarne la maison-atelier et l’artiste qu’elle habita.

Comme l’affirme parfaitement Mona Chollet dans Chez soi : une odyssée de l’espace domestique (2015) : « autant qu’un morceau du monde, la maison est un monde en soi : celui que son propriétaire porte dans sa tête et qu’elle matérialise ». Le lieu de vie se mélange au lieu de création, la création s’entremêle à la vie dans un amalgame parfait formant un tout. Un moment d’histoire de l’art immortalisé dans les entrailles de quelques murs parisiens.