Giacometti, Beckett : un cheminement commun

Giacometti, Beckett : un cheminement commun

« Tout jadis. Jamais rien d’autre. D’essayé. De raté. N’importe. Essayer encore. Rater encore. Rater mieux. » Cette phrase de Samuel Beckett, tirée du livre Cap au Pire de 1982, met en lumière la thématique commune fondamentale entre l’écrivain et Alberto Giacometti.

/// Mathilde Mascolo

Rater encore. Rater mieux, voilà ce qui constitue pour les deux artistes le sujet même de la création. L’échec est ainsi questionné, et la répétition d’un même geste poussée à son paroxysme. Cette recherche inlassable de l’essence même de l’expérience artistique aboutit à un principe phare : Faire plus, faire mieux, avec moins. Pour dire mieux, il faut enlever de la matière ; chez Giacometti, cela se traduit par des figures de plus en plus longilignes, affinées sans cesse jusqu’à presque en perdre forme humaine. Chez Beckett, ce « moins » se distingue dans ses écrits de plus en plus courts, ses décors scéniques de plus en plus dépouillés. Le but ultime de cet « imminimisable minime minimum » (Beckett, Cap au pire) est d’atteindre la substance même de la chose.

Le catalogue d’exposition « Giacometti / Beckett. Rater encore. Rater Mieux » tend à retracer l’amitié des deux artistes, non pas via une influence réciproque, mais par un cheminement commun. À travers ces pages, le lecteur explore les thématiques qui ont éveillé chez le sculpteur comme chez l’écrivain un intérêt particulier : la solitude, le corps contraint, la scénographie et l’empêchement à travers l’imagination sont ici étudiés. Il y a dans cette proximité de sujets une grande part d’intimité, qui prend le pas sur la relation publique qu’entretenaient les deux hommes.

Giacometti / Beckett. Rater encore. Rater mieux. Collectif. Fondation Giacometti et Fage éditions – 28 €