Le Petit Palais présente du 15 septembre au 14 octobre l’exposition Jakuchū, Le Royaume coloré des êtres vivants, rassemblant trente panneaux de l’artiste.
La fièvre du japonisme semble s’être emparée de la capitale, et ce n’est pas le Petit Palais qui fait exception à cette tendance. Une première pour ce grand artiste japonais du XVIIIe siècle de se voir consacrer une rétrospective en France. Car même si son œuvre est considérable, ce maître de la peinture reste tout de même peu connu par le grand public. La salle d’exposition se voit donc transformée pour accueillir les trente rouleaux peints d’Itō Jakuchū, et les mettre en valeur par un éclairage adapté. Un éclairage qui permet d’apprécier la multitude de détails minutieusement apposés sur ces grandes compositions. À la vue de ces œuvres, il est facile d’imaginer le peintre en pleine contemplation : la poésie et la sérénité qui s’en dégagent ne peuvent que provenir d’heures passées à observer son environnement.
Oiseaux, poissons, poules, insectes, tous semblent avoir une place aussi importante pour l’artiste qui retranscrit leur mouvement sur le support avec une précision impressionnante. Que ce soit pour une minuscule mésange perchée dans un coin, ou pour un majestueux Phoenix occupant presque tout l’espace, la même méticulosité anime chaque trait apposé par le pinceau du peintre. Dans un respect profond pour chaque être, Itō Jakuchū ne distingue pas de hiérarchie, il semble vouloir mettre en valeur chaque élément, chaque feuille, apposant, en même temps, son regard protecteur et émerveillé sur la nature qui l’entoure.
Et c’est sûrement sa palette qui lui permet d’obtenir un résultat où la lumière du soleil semble éclairer chaque scène. Par la technique du urazaishiki, où une couche de peinture est déposée non seulement à l’endroit, mais aussi sur le revers de la soie, les nuances sont profondes, jusqu’à créer une teinte dorée sans même recourir à l’or. Les matières semblent réelles, le manteau de neige qui recouvre certains arbres paraît s’être fraîchement déposé sur le support, nous laissant presque sentir la douceur de celui-ci. Chaque plumage de coq est pensé comme une œuvre à part entière : une basse-cour est en pleine effervescence sous nos yeux, les volatiles se bousculent, se battent ou picorent, mais chacun d’entre eux est unique, un motif est dédié à chaque plume, les couleurs se distinguent pour chaque duvet. La composition de ces animaux rassemblés en deviendrait un motif à lui seul, se déployant sur presque l’intégralité du rouleau, les coqs ne laissent pas de place à un possible arrière-plan, leurs corps s’agencent et hypnotisent telle une frise symétrique sortie de l’imaginaire du peintre.
Car les œuvres d’Itō Jakuchū ne sont pas seulement une représentation exacte d’une nature réelle, elles sont une ode à chaque feuille, chaque brindille, chaque plume d’un oiseau posé sur une branche, qui constituent, ensemble, un véritable royaume.
Texte : Angèle Imbert
Crédit Visuel : Itō Jakuchū, Coqs, 1761-1765, Tōkyō, Musée des collections impériales (Sannomaru Shōzōkan), Agence de la Maison impériale
Petit Palais
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