Tête-à-tête avec Pierrot Men, artiste photographe

Tête-à-tête avec Pierrot Men, artiste photographe

Du 20 mars au 11 juillet 2021, la galerie Capazza expose les œuvres de Pierrot Men, photographe autodidacte. S’attachant à transmettre sa vision de Madagascar et de ses habitants, l’artiste n’hésite pas à passer du noir et blanc aux couleurs éclatantes dans ses photographies ; témoins d’une histoire à la fois personnelle et universelle.

/// Mathilde Mascolo

Série pêche, Antrenna, Majunga - photographie sur papier Fine Art Hahnemühle Baryta white high-gloss 315gsm - 30 x 45 cm. © Galerie Capazza
Série pêche, Antrenna, Majunga – photographie sur papier Fine Art Hahnemühle Baryta white high-gloss 315gsm – 30 x 45 cm. © Galerie Capazza

Comment est née votre vocation d’artiste ? Quel est votre bagage artistique ?

Vers 1970, j’étais encore sur les bancs d’école lorsqu’un jour nous recevions la visite de l’artiste peintre Noël Razafintsalama. J’étais fasciné par ses œuvres ainsi que par son inspiration, son savoir-faire, sa technique. C’est à ce moment là que je me suis dis : Voilà ce que je veux faire dans ma vie. Je voulais devenir peintre. Du jour au lendemain, cette vocation étant restée ancrée dans ma tête, j’ai arrêté l’école… sans l’accord de mon père, ma mère étant déjà décédée quand j’avais 8 ans..

Je suis entièrement autodidacte, je m’inspirais beaucoup des rares cartes postales et magazines de l’époque pour produire mes peintures. Je me suis mis à la photographie une vingtaine d’années plus tard sous le conseil d’une amie qui trouvait les photos qui me servaient de support de copie pour mes peintures plus belles que mes peintures elles-mêmes.

Quelles sont vos inspirations artistiques, vos influences ?

L’humain a toujours été au centre de mes inspirations. Ayant grandi en même temps que l’histoire et les évènements qui ont façonné mon pays, le peuple malgache est au centre de mon travail. Je me reconnais dans le regard de chacun de mes compatriotes, lorsque je peignais ou quand je prends une photo, c’est une sorte d’autoportrait que je réalise. Le pinceau à l’époque, tout comme l’appareil photo aujourd’hui, me permettent de mettre en lumière l’expression viscérale des sentiments des malgaches, dans toute sa beauté mais aussi dans les drames qu’elle peut vivre.

Avez-vous une thématique récurrente dans vos photographies ?

Je photographie surtout les malgaches dans leur quotidien. En ce sens, je me sens un peu comme un chroniqueur. Je ne suis jamais à la recherche d’une thématique ou d’une problématique précise. Juste le quotidien. On m’a fait remarquer que les enfants et femmes ont une place importante dans mon catalogue d’archives. Je pense que l’explication vient du fait qu’inconsciemment je rends hommage à ma mère qui a disparu très tôt dans ma vie et à l’enfance que j’ai eue. En ce sens oui, les femmes et les enfants ont une place importante dans mes réalisations.

Arbre généalogique, vers Bekily, région Androy - 2008, Tirage par l'auteur (2021) sur papier Fine Art Hahnemühle Baryta white high-gloss 315 gsm, 30 x 45 cm. © Galerie Capazza
Arbre généalogique, vers Bekily, région Androy – 2008, Tirage par l’auteur (2021) sur papier Fine Art Hahnemühle Baryta white high-gloss 315 gsm, 30 x 45 cm. © Galerie Capazza

D’un point de vue technicité, comment sont-elles réalisées ?

Bien qu’ayant acquis des techniques au gré de mes expériences au fil des ans, je ne m’en soucie pas du tout, ou très peu lorsque je prends une photo. J’aime mieux faire confiance à mon instinct, à la sensibilité que j’éprouve face à une scène qui se présente devant moi. Au-delà de la technique, c’est cette sensibilité qui compte le plus pour moi, cette proximité et complicité que j’ai avec les malgaches et que je souhaite montrer dans mes images. J’ai remarqué pendant mon parcours qu’à trop réfléchir à la technique, je courrais le risque de voir disparaître la photo, c’est pourquoi j’aime mieux m’en tenir à mon instinct. La première photo est généralement la bonne, celle que j’avais en tête, les suivantes ne « valent » rien…

À quoi ressemble votre lieu de travail – votre atelier?

(Rires). Je vous invite à venir visiter Madagascar et à venir me voir à Fianarantsoa pour découvrir mon atelier, pour discuter et partager autour de la photo ensemble. Plus concrètement, mon atelier ressemble à une caverne d’Alibaba où j’entrepose mon matériel argentique et digital et où s’entassent plusieurs de mes images que les visiteurs peuvent venir fouiller. (rires encore)

Quels sont vos projets actuels et futurs ?

J’expose du 20 mars au 11 juillet à la Galerie Capazza à Nançay, jusqu’en novembre au Château de Hautefort (Dordogne) et d’autres expositions seront annoncées bientôt.

Je rêve pour les années à venir de publier une monographie qui retracera mes plus de 40 ans de photographie.

Le ton est donné : la photographie de Pierrot Men est une question d’émotion, de bienveillance, de témoignage. Représenté par la galerie Capazza depuis 2005, l’artiste vous invite à vous confrontez à ces images douces et brutales dans le cadre idyllique de ce patrimoine historique du XVIIe siècle.

Série pluie, Fianarantsoa - 2007, Tirage sur papier baryta Fine Art Hahnemühle high-gloss, 30 x 45 cm. © Galerie Capazza
Série pluie, Fianarantsoa – 2007, Tirage sur papier baryta Fine Art Hahnemühle high-gloss, 30 x 45 cm. © Galerie Capazza
Baobabs - n° 1/15, Tirage sur papier Fine Art Baryta Hahnemühle, 30 x 45 cm. © Galerie Capazza
Baobabs – n° 1/15, Tirage sur papier Fine Art Baryta Hahnemühle, 30 x 45 cm. © Galerie Capazza